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- John Strobbins, le détective-cambrioleur - José Moselli (1882 – 1941)
- La Margarita - José Moselli
La Margarita - José Moselli
John Strobbins, détective cambrioleur
1912
La manière dont John Strobbins s’y prit pour s’emparer de la merveilleuse perle « Margarita » est restée jusqu’ici entourée de mystère.
Et, bien que les plus astucieux policiers du monde entier, à la fois tentés par la prime de cent mille dollars promise par le président Shaft, et par la renommée attachée à pareille capture, aient épuisé leur science de déduction et leur flair professionnel à retrouver l’admirable perle, celle-ci n’a jamais reparu.
Par une note publiée dans le Washington Sun, le public apprit que la Margarita était devenue propriété de John Strobbins. Une photographie envoyée par le célèbre détective cambrioleur, représentant l’inestimable perle, et reproduite par le journal authentifiait les affirmations de John Strobbins.
Il importe, avant de relater les circonstances dans lesquelles fut enlevée la Margarita, de résumer l’histoire de cette perle unique.
La Margarita fut recueillie par un misérable pêcheur dans les parages de l’île Marguerite, le long de la côte du Venezuela.
Lorsqu’elle fut trouvée, la Margarita était une perle dite baroque, grosse comme le poing, mais parsemée de taches grises qui en ternissaient l’orient. Elle fut achetée par le señor Elias Agostino Barquisimelo. Ce noble vénézuélien, qui avait des raisons particulières et secrètes pour se ménager l’amitié du général Castro, président de la République de Venezuela, lui fit cadeau de la perle, dont la valeur résidait surtout dans sa grosseur plutôt que dans son orient.
Le général Castro, un jour qu’il avait besoin de charbon pour ravitailler l’unique navire de la République, troqua la perle contre trois cents tonnes d’anthracite, à John Hanger, citoyen américain et entrepositaire de combustible.
John Hanger, en voyant les défauts dont la perle était couverte, eut une idée géniale. D’un coup de marteau, il fracassa la couche de nacre imparfaite qui constituait l’extérieur de la précieuse gemme, et une admirable perle, grosse comme une noix, d’un orient doux et lumineux apparut.
Pendant quelques instants, John Hanger demeura stupide d’avoir mis au jour un pareil trésor. Puis, en bon Américain, il en supputa la valeur : plusieurs millions de dollars.
Deux jours plus tard, John Hanger prenait à la Guayra le paquebot pour New-York ; il emporta la Margarita dans sa ceinture. La merveilleuse perle, exposée sous la garde de six détectives dans les vitrines d’un joaillier de Broadway, fut acquise, moyennant trois millions de dollars par M. Jim Snowboots, roi de la canne à sucre.
Trois semaines plus tard, Jim Snowboots mourait. Il léguait la précieuse Margarita au National Museum, de Washington, sa ville natale.
Lorsque cette nouvelle fut connue, M. Herbert Roston, conservateur du National Museum s’occupa sans tarder de trouver un endroit où loger la merveilleuse Margarita à l’abri des voleurs.
À la même époque, précisément, John Strobbins songeait à s’en emparer !
Entreprise difficile, hérissée de difficultés, impossible, même !
Mais il convient de raconter les choses dans l’ordre naturel.
Un réduit spécial fut donc aménagé pour la Margarita dans une salle située au centre du National Museum, et dont les seules issues étaient deux portes de bronze et une verrière défendue par une robuste grille d’acier.
Malgré sa valeur, la belle Margarita ne pouvait prétendre à occuper seule cette salle.
M. Herbert Roston lui adjoignit donc une statue antique, trouvée à Athènes et quelques pièces d’orfèvrerie illustres.
Cette installation terminée, M. Herbert Roston pensa, non sans raison, que la salle de la Margarita méritait d’être inaugurée avec faste.
Pensez donc, the biggest finest pearl in the World ! (la plus grosse, la plus belle perle du monde !)
Le président Shaft accepta d’être le premier admirateur de la déjà fameuse perle. Et le 1er juillet, jour de l’inauguration de la Margarita, les invités furent nombreux pour examiner la merveille.
Il importe, maintenant, de fixer les circonstances réelles et détaillées qui accompagnèrent la disparition de la Margarita.
Ce fut quelques minutes après dix heures du matin que le président Shaft accompagné du gouverneur du district de Columbia, du maire de Philadelphie, du maire de New-York et d’une vingtaine de sénateurs, arriva devant le National Museum.
M. Herbert Roston entouré des six conservateurs, attendait devant la porte. Il s’avança vers son illustre visiteur et, en termes choisis, le remercia de l’honneur fait au National Museum.
Le président Shaft sourit :
— Trop aimable, M. Roston, dit-il… Voyons donc cette perle fameuse !
Empressé et important, le conservateur du National Museum s’inclina, et, courtoisement, montra le chemin au président. Ce dernier, entouré des gouverneurs et sénateurs, suivit Herbert Roston. Il traversa le vestibule, décoré de plantes vertes pour la circonstance, franchit le hall des souvenirs de l’Indépendance et arriva enfin dans la salle de la Margarita.
C’était une pièce ovale, aux murs de stuc peints à fresque. Le sol était dallé de marbre blanc. Sur des socles, quelques statuettes plus ou moins mutilées, et, dans des vitrines divers bijoux terreux auxquels personne ne prêta la moindre attention.
La perle attirait toutes les curiosités.
Elle reposait sur un coussin de satin noir posé à même le guéridon de bronze, au centre de la salle. Les rayons du soleil entrant par la verrière la faisaient luire doucement.
— Comme vous le voyez, Monsieur le Président, dit le conservateur, cette magnifique perle est, de beaucoup, la plus grosse du monde ! Elle pèse exactement 1,153 carats et son orient est incomparable !
M. Shaft s’inclina. Autour du guéridon, sénateurs et gouverneurs s’étaient rangés. Quelques-uns étaient pâles en pensant à l’énorme valeur de la gemme. Ils tendaient le cou et hochaient la tête en silence.
— Voici les quatre gardiens préposés à la surveillance de la Margarita, s’écria M. Herbert Roston en indiquant du doigt au président quatre solides gaillards qui, postés près du guéridon n’avaient pas dit un mot ; de plus la perle sera enfermée dans un coffret d’épais cristal qui tout en en permettant la vue, la préservera de la poussière et des voleurs !
— Eh ! elle en vaut la peine ! bien qu’elle ne soit pas facilement négociable ! remarqua le président Shaft ; et, tirant sa montre, il conclut :
— Tous mes remerciements, cher M. Roston, pour votre amabilité et toutes mes félicitations aussi pour l’art, le goût, avec lesquels vous, avez su placer cette belle perle dans un cadre digne d’elle !
Le conservateur du National Museum, s’inclina, flatté.
Le président Shaft, à pas lents, se dirigea vers la porte, tandis qu’autour de lui, sa suite, revenue de son émotion, échangeait les réflexions que lui suggérait l’admirable Margarita.
Déjà tout le monde avait quitté la salle et Herbert Roston, resté le dernier s’apprêtait à fermer la porte, lorsque, se retournant, il vit que, sur le coussin de soie noire, la tache lumineuse fournie par la perle avait disparu.
Il sentit son sang refluer vers son cœur et bondit vers le guéridon : la Margarita n’y était plus !
D’un coup d’œil sur le sol de marbre, il se convainquit qu’elle n’était pas tombée. Il courut vers le président Shaft qui, entouré des sénateurs, causait avec le gouverneur de New-York dans la salle adjacente.
— Monsieur le Président, marmotta-t-il-on a enlevé la Margarita !
Ce fut une stupeur. Derrière le conservateur du National Museum les quatre gardiens de la Margarita, corroboraient par leur attitude piteuse les dires de leur supérieur.
Le président Shaft leva la tête et fixa de ses yeux gris l’infortuné fonctionnaire :
— On a enlevé la Margarita ?… dit-il…
« Et qui ? Comment ? Elle ne peut être loin en tous cas !
Ces mois avaient été prononcés d’une voix forte. L’assistance entière les entendit et, pendant un instant, un silence gêné régna.
M. Thomas Glifford, sénateur du Wisconsin, qui se trouvait à côté du président Shaft, s’écria :
— Si la Margarita n’y est plus, c’est qu’on l’a volée ! Il importe de tirer cette affaire au clair… Pour moi, je consens à me laisser fouiller… Ce sera vite fait, d’ailleurs, j’ai juste mon habit et ma chemise !
Herbert Roston, embarrassé, se taisait.
Le président Shaft se tourna vers sa suite.
— Venez, gentlemen, dit-il, retournons à la salle de la Margarita… La perle a peut-être roulé dans un coin…
Le conservateur du National Museum ne répondit rien. Mais sa physionomie exprima une incrédulité navrée. Entouré des quatre gardiens, il pénétra dans la salle de la Margarita. Le président Shaft, suivi des gouverneurs et sénateurs – dont pas un ne l’avait quitté, y entra également.
En quelques instants, l’assistance fut convaincue : la perle n’était plus dans la salle ! Alors ?
Le président Shaft regarda autour de lui. Il vit Marc Carters, sénateur de l’Illinois, Robert Shum, du Kentucky, Nathaniel Bordson, du Colorado, James Hunter de l’Idaho, Peter Hornsby de la Floride, James Billiken du Texas, John Camstower du Massachussetts… Il vit Albert Sloan, gouverneur du Columbia, Samiel Vickers et Charles Breston, maires de New-York et de Philadelphie. Tous ces gens-là, il les connaissait depuis de longues années. C’étaient de parfaits gentlemen, dont le plus pauvre possédait plusieurs millions de dollars. Ils étaient insoupçonnables.
Au cours de sa vie agitée, le président Shaft en avait vu, comme on dit vulgairement, de toutes les couleurs !
Il eut vite pris son parti :
— M. Hubert Roston, la Margarita est partie : retrouvez-la !… Vous m’en voyez navré et ces gentlemen aussi… Je vous souhaite une prompte réussite… Venez, gentlemen !
Sur ces mots, le président, se dirigea vers la porte, et, suivi de son entourage, se retira, sans que l’infortuné Herbert Roston eût pu prononcer un mot.
Les quatre gardiens, aussi atterrés que leur chef, restaient immobiles, les bras ballants.
L’un d’eux fit un mouvement vers la porte. C’en fut assez pour rendre la parole au conservateur du National Museum.
— Que personne ne bouge ! dit-il, je vais vous fouiller ! Hand’s up ! (les mains en l’air !)
Les quatre hommes levèrent les bras d’un même mouvement. Herbert Roston, fébrile, explora leurs poches. Il y trouva des cordes de tabac à chiquer, quelques cents, des mouchoirs sales, des trousseaux de clefs et une pipe. De perle, point.
— Déshabillez-vous ! commanda-t-il.
La mine un peu ironique, les gardiens quittèrent leurs vêtements que le conservateur du National Museum examina de nouveau. Il dût se convaincre qu’ils ne contenaient plus rien !
— C’est bien, grommela-t-il, vous pouvez vous rhabiller !
Les quatre hommes obéirent.
Où pouvait bien être la Margarita ? Puisque les invités du président Shaft ne pouvaient être soupçonnés, il fallait que le voleur fût un des gardiens. Mais où avait-il caché la perle ? Dans son estomac ? Elle était trop grosse – et de beaucoup – pour pouvoir être avalée ! La perle était certainement dans la salle ! Mais où ? De nouveau, Herbert Roston fouilla les moindres recoins, déplaça statuettes et vitrines. Sans succès !
De guerre lasse, il téléphona à la police, il se résigna à rendre publique la disparition de l’incomparable perle.
Le détective Ned Carver arriva au National Museum quelques minutes plus tard. Il interrogea les quatre gardiens, se fit donner par Herbert Roston le détail, minute par minute, des incidents divers de la visite présidentielle et, après un bref instant de réflexion, conclut :
— Aucun doute : c’est John Strobbins qui a fait le coup !
— Alors la perle est perdue ?
— Je le crains fort !
— Mais puisque le président a formellement affirmé qu’il connaissait de longue date toutes les personnes qui l’accompagnaient.
— Eh ! John Strobbins se sera fait la tête de l’une d’elles ! Vous les avez comptés ?… Combien étaient-ils avec le président ?
— Ça… je ne saurais vous le dire !… quinze ou vingt au plus !
— Quinze ou vingt ? Il faudrait que vous essayiez de vous rappeler leurs noms à tous ! J’irais ensuite leur rendre visite !
— Je vais faire mon possible ! affirma Herbert Roston.
Ned Carver, sans répondre, regarda le conservateur du National Museum d’un œil méfiant. Il leva la tête et soudain, s’écria :
— Êtes-vous sûr que la perle n’a pas été jetée dans la verrière ?
Herbert Roston haussa les épaules, le détective l’agaçait :
— Non ! dit-il… D’ailleurs, venez avec moi sur le toit : vous y verrez que la verrière est protégée par un grillage serré et de solides barreaux !
— Allons voir ! demanda Ned Carver.
Il dut se rendre à l’évidence : la verrière était intacte !
Il interrogea de nouveau les quatre gardiens : ces braves gens ne purent que lui répéter leurs dépositions.
L’affaire devenait de plus en plus mystérieuse.
Dans l’après-midi, Herbert Roston, ayant fait appel à ses souvenirs parvint à dresser la liste des invités du président Shaft.
Ned Carver alla les voir et, en interrogeant l’un et l’autre, parvint à reconstituer la liste exacte et complète des personnes ayant accompagné le président au National Museum.
Il leur rendit visite et n’en fut pas plus avancé pour cela. Après un mois de recherches, la Margarita n’était toujours pas retrouvée ! Les journaux s’occupèrent pendant quelques jours de cette mystérieuse disparition, puis passèrent à d’autres sujets. Herbert Roston fut révoqué.
Le premier acte de son successeur fut d’aménager la salle qui aurait dû servir d’abri à la Margarita. Un bloc d’or, d’une pureté extraordinaire, extrait au Klondike par un mineur américain, fut placé dans le coffret de cristal destiné à la perle disparue. Et le public put de nouveau pénétrer dans la salle, et admirer le précieux métal, à défaut de la Margarita.
Herbert Roston n’attendit pas longtemps sa vengeance !
Trois jours après la réouverture de la salle Margarita, comme s’obstinait de l’appeler le public, le Washington Sun publia le sensationnel article qui suit :
COMMENT SONT GARDÉS NOS MUSÉES.
Il semblait qu’après la disparition de la précieuse Margarita une surveillance active et incessante eût dû être faite dans nos musées pour prévenir le retour de faits aussi déplorables. Il n’en est rien !
Mr Herbert Roston, conservateur du National Museum, a été révoqué pour négligence… Or, que fait son successeur ?… La même chose que lui ! Rien !
Nous allons le prouver.
Hier soir, à dix heures, un inconnu s’est présenté aux bureaux du Washington Sun. Introduit sur sa demande, dans le bureau de notre rédacteur en chef, il sortit de sous son manteau une statuette indienne, en bois d’ébène incrusté de bronze et portant collé sur son socle le numéro 153.
— Cette statuette, nous déclara l’inconnu, je l’ai volée au National Museum, dans la salle de la Margarita, aujourd’hui même ! Elle n’a, en vérité, pas une très grande valeur, et il m’eût été facile d’en prendre une plus précieuse ! Mais, j’ai des raisons que je vous expliquerai un autre jour, pour l’avoir choisie.
« Je vous la laisse, cependant. Exposez-là dans vos vitrines et laissez-moi vous dire qu’elle en vaut la peine ! »
Ayant achevé ces paroles énigmatiques, notre visiteur posa la statuette sur notre bureau, nous salua fort civilement et s’en alla.
La statue n° 153 est exposée à notre vitrine, Cleveland avenue, où chacun peut la voir !
On peut affirmer sans crainte que le National Museum est pour le moins aussi mal gardé que le Louvre à Paris ! »
… Le résultat de cet article ne se fit pas attendre. Pendant toute la journée une foule énorme défila devant l’hôtel du Washington Sun pour contempler la statuette volée.
Une rapide enquête, aussitôt faite par la police, démontra que l’inconnu du Washington Sun n’avait pas menti et que la statuette en question avait bien été dérobée au National Museum.
Elle y fut, d’ailleurs, retournée le même jour, cependant que le directeur du Washington Sun était inculpé de vol par recel. C’est peut-être pour cela qu’il ne se décida jamais à publier la lettre qu’il reçut le lendemain.
Lettre fort intéressante et instructive.
Elle révélait le nom du voleur : John Strobbins.
Et, maintenant que la Margarita est à jamais peut-être disparue, l’on apprendra avec plaisir la façon dont s’y prit le détective cambrioleur afin de se l’approprier. Voici, d’ailleurs, la copie textuelle de la missive de John Strobbins au directeur du Washington Sun :
Monsieur le Directeur,
Bien qu’ayant une propension exagérée peut-être à m’emparer du bien d’autrui – on ne se refait pas, hélas ! – je n’en suis pas moins patriote dans l’âme. United States for ever !
J’aime ma patrie ! J’en ai donné des preuves. Et rien de ce qui peut amoindrir son patrimoine ne saurait me laisser froid !
Je le prouve.
Le National Museum contient, vous le savez, des glorieuses reliques, de l’indépendance nationale, notamment l’épée de Washington, la boucle de ceinture de sa nourrice, une des tuiles du toit de sa maison.
Je me plais, à mes heures de loisirs, à retremper mon âme au milieu de ces témoins d’une époque héroïque.
Aussi, quels ne furent pas mon chagrin, ma stupéfaction, mon indignation, lorsqu’au cours de mes visites au National Museum, je me rendis compte du peu de surveillance entourant ces nobles souvenirs.
Je résolus donc de donner une leçon aux hommes insouciants chargés de leur garde et, sans grande difficulté, m’emparai, il y a de cela six semaines, de la statuette cotée sous le numéro 153, et représentant une divinité indienne.
Personne ne s’en aperçut !
Ne voulant pas que cette leçon fût perdue, je me disposais à porter à votre journal le fruit de ma dextérité, lorsque j’appris en même temps la mort de Jim Snowboots et le legs de la Margarita au National Museum.
Depuis longtemps, je convoitais cette perle digne en tous points de figurer dans mes collections. Cette raison, jointe au souci de donner une leçon retentissante au négligent conservateur de nos souvenirs nationaux, m’incita à me rendre possesseur de la belle Margarita.
Dans ce but, je remis en place sur son socle au National Museum la statuette volée – dont personne ne s’était aperçu de la disparition – il ne fallait pas donner l’éveil.
Puis, je m’informais de l’endroit où devait être exposée la Margarita.
Je connus le nom du fabricant chargé de confectionner le guéridon de bronze destiné à supporter la perle et son écrin ! Je me fis embaucher comme ciseleur – j’ai quelque talent dans cet art – et travaillai à ce guéridon. Je réussis à dissimuler parmi les moulures une cachette à secret, invisible, mais assez grande pour contenir la perle. C’est tout !
Il ne s’agissait plus que de l’y mettre ! Ce fut facile grâce à un peu de psychologie. Oui ! de psychologie !
Sans réfléchir beaucoup, il était facile comprendre que le jour de la visite du prévient Shaft la surveillance serait nulle !
On ne suspecte pas le président de la République des États-Unis !… De plus, le conservateur, et tout le monde aurait l’attention tournée vers le vénéré président Shaft, de qui dépendent faveurs et avancements…
Grâce à de hautes protections, je fis embaucher, huit jours avant l’inauguration, parmi les quatre gardiens un de mes lieutenants les plus sûrs. Celui-ci n’eut qu’à introduire la perle, d’un geste rapide, dans la cachette ménagée dans le guéridon, au moment où tout le monde s’occupait à offrir ses congratulations au président Shaft qui, sa visite terminée, se dirigeait vers la porte…
J’attendis que l’émotion produite par la disparition de la Margarita se fût calmée. Et, il y a trois jours, j’entrai au National Museum sans être vu, je retirai la perle de sa cachette et la mis dans ma poche. Je pus constater que la surveillance n’y était pas mieux exercée qu’avant. J’en pus peiné.
Et, après avoir été mettre la Margarita en lieu sûr, je revins au National Museum et y repris la statuette na 153 que je vous apportai.
J’espère que cette alerte contribuera à donner un peu plus de sécurité à nos trésors nationaux, et dans cet espoir, je vous prie de croire, Monsieur le directeur, à mes sentiments très distingués.
JOHN STROBBINS
Post-Scriptum-– Faites vérifier le guéridon, la cachette qui contient la Margarita se trouve sous l’aigle de bronze qui tient le drapeau américain dans ses serres. J. S. - FIN
Date de dernière mise à jour : 19/01/2025
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