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BIBLIOBUS Littérature française

Poésie ininterrompue (1946)

 

 

Table des matières

  • Poésie ininterrompue  (1946)
  • Le travail du poète
  • Le travail du peintre
  • À l’échelle animale
  • L’âge de la vie

 

 

 

La résistance s’organise sur tous les fronts purs.
Tristan Tzara : L’Antitête, 1933.

POÉSIE ININTERROMPUE

(1946)

Je dédie ces pages à ceux qui les liront mal et à ceux qui ne les aimeront pas.

……

Nue effacée ensommeillée

Choisie sublime solitaire

Profonde oblique matinale

Fraîche nacrée ébouriffée

Ravivée première régnante

Coquette vive passionnée

Orangée rose bleuissante

Jolie mignonne délurée

Naturelle couchée debout

Étreinte ouverte rassemblée

Rayonnante désaccordée

Gueuse rieuse ensorceleuse

Étincelante ressemblante

Sourde secrète souterraine

Aveugle rude désastreuse

Boisée herbeuse ensanglantée

Sauvage obscure balbutiante

Ensoleillée illuminée

Fleurie confuse caressante

Instruite discrète ingénieuse

Fidèle facile étoilée

Charnue opaque palpitante

Inaltérable contractée

Pavée construite vitrifiée

Globale haute populaire

Barrée gardée contradictoire

Égale lourde métallique

Impitoyable impardonnable

Surprise dénouée rompue

Noire humiliée éclaboussée

 

Sommes-nous deux ou suis-je solitaire

 

Comme une femme solitaire

Qui dessine pour parler

Dans le désert

Et pour voir devant elle

 

L’année pourrait être heureuse

Un été en barres

Et l’hiver la neige est un lit bien fait

Quant au printemps on s’en détache

Avec des ailes bien formées

 

Revenue de la mort revenue de la vie

Je passe de juin à décembre

Par un miroir indifférent

Tout au creux de la vue

 

Comme une femme solitaire

Resterai-je ici-bas

Aurai-je un jour réponse à tout

Et réponse à personne

 

Le poids des murs ferme toutes les portes

Le poids des arbres épaissit la forêt

Va sur la pluie vers le ciel vertical

Rouge et semblable au sang qui noircira

 

Le soleil naît sur la tranche d’un fruit

La lune naît au sommet de mes seins

Le soleil fuit sur la rosée

La lune se limite

 

La vérité c’est que j’aimais

Et la vérité c’est que j’aime

De jour en jour l’amour me prend première

Pas de regrets j’ignore tout d’hier

Je ne ferai pas de progrès

 

Sur une autre bouche

Le temps me prendrait première

 

Et l’amour n’a pas le temps

Qui dessine dans le sable

Sous la langue des grands vents

 

Je parle en l’air

À demi-mot

Je me comprends

 

L’aube et la bouche où rit l’azur des nuits

Pour un petit sourire tendre

Mon enfant frais de ce matin

Que personne ne regarde

 

Mon miroir est détaché

De la grappe des miroirs

Une maille détachée

L’amour juste le reprend

 

Rien ne peut déranger l’ordre de la lumière

Où je ne suis que moi-même

Et ce que j’aime

Et sur la table

Ce pot plein d’eau et le pain du repos

Au fil des mains drapées d’eau claire

Au fil du pain fait pour la main friande

De l’eau fraîche et du pain chaud

Sur les deux versants du jour

 

Aujourd’hui lumière unique

Aujourd’hui l’enfance entière

Changeant la vie en lumière

Sans passé sans lendemain

Aujourd’hui rêve de nuit

Au grand jour tout se délivre

Aujourd’hui je suis toujours

Je serai la première et la seule sans cesse

Il n’y a pas de drame il n’y a que mes yeux

Qu’un songe tient ouverts

Ma chair est ma vertu

Elle multiplie mon image

 

Je suis ma mère et mon enfant

En chaque point de l’éternel

Mon teint devient plus clair mon teint devient plus sombre

Je suis mon rayon de soleil

Et je suis mon bonheur nocturne

 

Tous les mots sont d’accord

La boue est caressante

Quand la terre dégèle

Le ciel est souterrain

Quand il montre la mort

Le soir est matinal

Après un jour de peine

 

Mais l’homme

L’homme aux lentes barbaries

L’homme comme un marais

L’homme à l’instinct brouillé

À la chair en exil

L’homme aux clartés de serre

Aux yeux fermés l’homme aux éclairs

L’homme mortel et divisé

Au front saignant d’espoir

L’homme en butte au passé

Et qui toujours regrette

Isolé quotidien

Dénué responsable

 

Savoir vieillir savoir passer le temps

 

Savoir régner savoir durer savoir revivre

Il rejeta ses draps il éclaira la chambre

Il ouvrit les miroirs légers de sa jeunesse

Et les longues allées qui l’avaient reconduit

 

Être un enfant être une plume à sa naissance

Être la source invariable et transparente

Toujours être au cœur blanc une goutte de sang

Une goutte de feu toujours renouvelée

 

Mordre un rire innocent mordre à même la vie

Rien n’a changé candeur rien n’a changé désir

L’hiver j’ai mon soleil il fait fleurir ma neige

Et l’été qui sent bon a toutes les faiblesses

 

L’on m’aimera car j’aime par-dessus tout ordre

Et je suis prêt à tout pour l’avenir de tous

Et je ne connais rien de rien à l’avenir

Mais j’aime pour aimer et je mourrai d’amour

 

Il se mit à genoux pour un premier baiser

La nuit était pareille à la nuit d’autrefois

Et ce fut le départ et la fin du passé

La conscience amère qu’il avait vécu

 

Alors il réveilla les ombres endormies

La cendre grise et froide d’un murmure tu

La cendre de l’aveugle et la stérilité

Le jour sans espérance et la nuit sans sommeil

 

L’égale pauvreté d’une vie limitée

 

Tous les mots se reflètent

Et les larmes aussi

Dans la force perdue

Dans la force rêvée

 

Hier c’est la jeunesse hier c’est la promesse

 

Pour qu’un seul baiser la retienne

Pour que l’entoure le plaisir

Comme un été blanc bleu et blanc

Pour qu’il lui soit règle d’or pur

Pour que sa gorge bouge douce

Sous la chaleur tirant la chair

Vers une caresse infinie

Pour qu’elle soit comme une plaine

Nue et visible de partout

Pour qu’elle soit comme une pluie

Miraculeuse sans nuage

Comme une pluie entre deux feux

Comme une larme entre deux rires

Pour qu’elle soit neige bénie

Sous l’aile tiède d’un oiseau

Lorsque le sang coule plus vite

Dans les veines du vent nouveau

Pour que ses paupières ouvertes

Approfondissent la lumière

Parfum total à son image

Pour que sa bouche et le silence

Intelligibles se comprennent

Pour que ses mains posent leur paume

Sur chaque tête qui s’éveille

Pour que les lignes de ses mains

Se continuent dans d’autres mains

Distances à passer le temps

 

Je fortifierai mon délire

 

De l’océan à la source

De la montagne à la plaine

Court le fantôme de la vie

L’ombre sordide de la mort

Mais entre nous

Une aube naît de chair ardente

Et bien précise

Qui remet la terre en état

Nous avançons d’un pas tranquille

Et la nature nous salue

Le jour incarne nos couleurs

Le feu nos yeux et la mer notre union

Et tous les vivants nous ressemblent

Tous les vivants que nous aimons

 

Les autres sont imaginaires

Faux et cernés de leur néant

Mais il nous faut lutter contre eux

Ils vivent à coups de poignard

Ils parlent comme un meuble craque

Leurs lèvres tremblent de plaisir

À l’écho de cloches de plomb

À la mutité d’un or noir

 

Un cœur seul pas de cœur

Un seul cœur tous les cœurs

Et les corps chaque étoile

Dans un ciel plein d’étoiles

Dans la carrière en mouvement

De la lumière et des regards

Notre poids brillant sur terre

Patine de la volupté

 

À chanter des plages humaines

Pour toi la vivante que j’aime

Et pour tous ceux que nous aimons

Qui n’ont envie que de s’aimer

Je finirai bien par barrer la route

Au flot des rêves imposés

Je finirai bien par me retrouver

Nous prendrons possession du monde

 

Ô rire végétal ouvrant une clairière

De gorges chantonnant interminablement

Mains où le sang s’est effacé

Où l’innocence est volontaire

Gaieté gagnée tendresse du bois mort

Chaleurs d’hiver pulpes séchées

Fraîcheurs d’été sortant des fleurs nouvelles

Constant amour multiplié tout nu

 

Rien à haïr et rien à pardonner

Aucun destin n’illustre notre front

Dans l’orage notre faiblesse

Est l’aiguille la plus sensible

Et la raison de l’orage

Image ô contact parfait

L’espace est notre milieu

Et le temps notre horizon

 

Quelques cailloux sur un sentier battu

De l’herbe comme un souvenir vague

Le ciel couvert et la nuit en avance

Quelques vitrines étrennant leurs lampes

Des trous la porte et la fenêtre ouvertes

Sur des gens qui sont enfermés

Un petit bar vendu et revendu

Apothéose de chiffres

Et de soucis et de mains sales

 

Un désastre profond

Où tout est mesuré même la tristesse

Même la dérision

Même la honte

La plaine est inutile

Le rire est imbécile

Le désert des taches grandit

Mieux que sur un suaire

 

Les yeux ont disparu les oiseaux volent bas

On n’entend plus le bruit des pas

Le silence est comme une boue

Pour les projets sans lendemain

Et soudain un enfant crie

Dans la cage de son ennui

Un enfant remue des cendres

Et rien de vivant ne bouge

 

Je rends compte du réel

Je prends garde à mes paroles

Je ne veux pas me tromper

Je veux savoir d’où je pars

Pour conserver tant d’espoir

Mes origines sont les larmes

Et la fatigue et la douleur

Et le moins de beauté

Et le moins de bonté

 

Le regret d’être au monde et l’amour sans vertu

M’ont enfanté dans la misère

Comme un murmure comme une ombre

Ils mourront ils sont morts

Mais ils vivront glorieux

Sable dans le cristal

Nourricier malgré lui

Plus clair qu’en plein soleil

 

Le regret d’être au monde

 

Je n’ai pas de regrets

Plus noir plus lourd est mon passé

Plus léger et limpide est l’enfant que j’étais

L’enfant que je serai

Et la femme que je protège

La femme dont j’assume

L’éternelle confiance

 

Comme une femme solitaire

Qui dessine pour parler

Dans le désert

Et pour voir devant elle

Par charmes et caprices

Par promesses par abandons

 

Entr’ouverte à la vie

Toujours soulignée de bleu

 

Comme une femme solitaire

À force d’être l’une ou l’autre

Et tous les éléments

 

Je saurai dessiner comme mes mains épousent

La forme de mon corps

Je saurai dessiner comme le jour pénètre

Au fin fond de mes yeux

 

Et ma chaleur fera s’étendre les couleurs

Sur le lit de mes nuits

Sur la nature nue où je tiens une place

Plus grande que mes songes

 

Où je suis seule et nue où je suis l’absolu

L’être définitif

La première femme apparue

Le premier homme rencontré

Sortant du jeu qui les mêlait

Comme doigts d’une même main

 

La première femme étrangère

Et le premier homme inconnu

La première douleur exquise

Et le premier plaisir panique

 

Et la première différence

Entre des êtres fraternels

Et la première ressemblance

Entre des êtres différents

 

Le premier champ de neige vierge

Pour un enfant né en été

Le premier lait entre les lèvres

D’un fils de chair de sang secret

 

Buisson de roses et d’épines

Route de terre et de cailloux

À ciel ardent ciel consumé

À froid intense tête claire

 

Rocher de fardeaux et d’épaules

Lac de reflets et de poissons

À jour mauvais bonté remise

À mer immense voile lourde

 

Et j’écris pour marquer les années et les jours

Les heures et les hommes leur durée

Et les parties d’un corps commun

Qui a son matin

Et son midi et son minuit

Et de nouveau son matin

Inévitable et paré

De force et de faiblesse

De beauté de laideur

De repos agréable et de misérable lumière

Et de gloire provoquée

 

D’un matin sorti d’un rêve le pouvoir

De mener à bien la vie

Les matins passés les matins futurs

Et d’organiser le désastre

Et de séparer la cendre du feu

 

D’une maison les lumières naturelles

Et les ponts jetés sur l’aube

D’un matin la chair nouvelle

La chair intacte pétrie d’espoir

Dans la maison comme un glaçon qui fond

 

Du bonheur la vue sans pitié

Les yeux bien plantés sur leurs jambes

Dans la fumée de la santé

Du bonheur comme une règle

Comme un couteau impitoyable

Tranchant de tout

Sauf de la nécessité

 

D’une famille le cœur clos

Gravé d’un nom insignifiant

 

D’un rire la vertu comme un jeu sans perdants

Montagne et plaine

Calculées en tout point

Un cadeau contre un cadeau

Béatitudes s’annulant

 

D’un brasier les cloches d’or aux paupières lentes

Sur un paysage sans fin

Volière peinte dans l’azur

Et d’un sein supposé le poids sans réserves

Et d’un ventre accueillant la pensée sans raison

Et d’un brasier les cloches d’or aux yeux profonds

Dans un visage grave et pur

 

D’une volière peinte en bleu

Où les oiseaux sont des épis

Jetant leur or aux pauvres

Pour plus vite entrer dans le noir

Dans le silence hivernal

 

D’une rue

D’une rue ma défiguration

Au profit de tous et de toutes

Les inconnus dans la poussière

Ma solitude mon absence

 

D’une rue sans suite

Et sans saluts

Vitale

Et pourtant épuisante

La rencontre niée

 

De la fatigue le brouillard

Prolonge loques et misères

À l’intérieur de la poitrine

Et le vide aux tempes éteintes

Et le crépuscule aux artères

 

Du bonheur la vue chimérique

Comme au bord d’un abîme

Quand une grosse bulle blanche

Vous crève dans la tête

Et que le cœur est inutilement libre

 

Mais du bonheur promis et qui commence à deux

La première parole

Est déjà un refrain confiant

Contre la peur contre la faim

Un signe de ralliement

 

D’une main composée pour moi

Et qu’elle soit faible qu’importe

Cette main double la mienne

Pour tout lier tout délivrer

Pour m’endormir pour m’éveiller

 

D’un baiser la nuit des grands rapports humains

Un corps auprès d’un autre corps

La nuit des grands rapports terrestres

La nuit native de ta bouche

La nuit où rien ne se sépare

 

Que ma parole pèse sur la nuit qui passe

Et que s’ouvre toujours la porte par laquelle

Tu es entrée dans ce poème

Porte de ton sourire et porte de ton corps

 

Par toi je vais de la lumière à la lumière

De la chaleur à la chaleur

C’est par toi que je parle et tu restes au centre

De tout comme un soleil consentant au bonheur

 

Mais il nous faut encore un peu

Accorder nos yeux clairs à ces nuits inhumaines

Des hommes qui n’ont pas trouvé la vie sur terre

Il nous faut qualifier leur sort pour les sauver

 

Nous partirons d’en bas nous partirons d’en haut

De la tête trop grosse et de la tête infime

En haut un rien de tête en bas l’enflure ignoble

En haut rien que du front en bas rien que menton

Rien que prison collant aux os

Rien que chair vague et que poisons gobés

Par la beauté par la laideur sans répugnance

Toujours un œil aveugle une langue muette

Une main inutile un cœur sans résonance

Près d’une langue experte et qui voit loin

Près d’un œil éloquent près d’une main prodigue

Trop près d’un cœur qui fait la loi

 

La loi la feuille morte et la voile tombée

La loi la lampe éteinte et le plaisir gâché

La nourriture sacrifiée l’amour absurde

La neige sale et l’aile inerte et la vieillesse

 

Sur les champs un ciel étroit

Soc du néant sur les tombes

 

Au tournant les chiens hurlant

Vers une carcasse folle

 

Au tournant l’eau est crépue

Et les champs claquent des dents

 

Et les chiens sont des torchons

Léchant des vitres brisées

 

Sur les champs la puanteur

Roule noire et bien musclée

 

Sur le ciel tout ébréché

Les étoiles sont moisies

 

Allez donc penser à l’homme

Allez donc faire un enfant

 

Allez donc pleurer ou rire

Dans ce monde de buvard

 

Prendre forme dans l’informe

Prendre empreinte dans le flou

 

Prendre sens dans l’insensé

Dans ce monde sans espoir

 

Si nous montions d’un degré

 

Le jour coule comme un œuf

Le vent fané s’effiloche

 

Toute victoire est semblable

Des ennemis des amis

 

Ennemis amis pâlots

Que même le repos blesse

 

Et de leurs drapeaux passés

Ils enveloppent leurs crampes

 

Beaux oiseaux évaporés

Ils rêvent de leurs pensées

 

Ils se tissent des chapeaux

Cent fois plus grands que leur tête

 

Ils méditent leur absence

Et se cachent dans leur ombre

 

Ils ont été au présent

Ceci entre parenthèses

 

Ils croient qu’ils ont été des diables des lionceaux

Des chasseurs vigoureux des nègres transparents

Des intrus sans vergogne et des rustres impurs

Des monstres opalins et des zèbres pas mal

 

Des anonymes redoutables

Des calembours et des charades

 

Et la ligne de flottaison

Sur le fleuve héraclitéen

 

Et l’hospitalité amère

Dans un asile carnassier

 

Et le déshonneur familial

Et le point sec des abreuvoirs

 

Ils croient ils croient mais entre nous

Il vaut encore mieux qu’ils croient

 

Si nous montions d’un degré

 

C’est la santé l’élégance

En dessous roses et noirs

 

Rousseurs chaudes blancheurs sobres

Rien de gros rien de brumeux

 

Les coquilles dans la nuit

D’un piano sans fondations

 

Les voitures confortables

Aux roues comme des guirlandes

 

C’est le luxe des bagages

Blasés jetés à la mer

 

Et l’aisance du langage

Digéré comme un clou par un mur

 

Les idées à la rigolade

Les désirs à l’office

 

Une poule un vin la merde

Réchauffés entretenus

 

Si nous montions d’un degré

Dans ce monde sans images

 

Vers la plainte d’un berger

Qui est seul et qui a froid

 

Vers une main généreuse

Qui se tend et que l’on souille

 

Vers un aveugle humilié

De se cogner aux fenêtres

 

Vers l’excuse désolée

D’un malheureux sans excuses

 

Vers le bavardage bête

Des victimes consolées

 

Semaines dimanches lâches

Qui s’épanchent dans le vide

 

Durs travaux loisirs gâchés

Peaux grises résorbant l’homme

 

Moralité de fourmi

Sous les pieds d’un plus petit

 

Si nous montions d’un degré

 

La misère s’éternise

La cruauté s’assouvit

 

Les guerres s’immobilisent

Sur les glaciers opulents

 

Entre les armes en broussailles

Sèchent la viande et le sang

 

De quoi calmer les âmes amoureuses

De quoi varier le cours des rêveries

 

De quoi provoquer l’oubli

Aussi de quoi changer la loi

 

La loi la raison pratique

 

Et que comprendre juge

L’erreur selon l’erreur

 

Si voir était la foudre

Au pays des charognes

 

Le juge serait dieu

Il n’y a pas de dieu

 

Si nous montions d’un degré

 

Vers l’extase sans racines

Toute bleue j’en suis payé

 

Aussi bien que de cantiques

Et de marches militaires

 

Et de mots définitifs

Et de bravos entraînants

 

Et la secousse idéale

De la vanité sauvage

 

Et le bruit insupportable

Des objecteurs adaptés

 

Le golfe d’une serrure

Abrite trop de calculs

 

Et je tremble comme un arbre

Au passage des saisons

 

Ma sève n’est qu’une excuse

Mon sang n’est qu’une raison

 

Si nous montions d’un degré

 

Mes vieux amis mon vieux Paul

Il faut avouer

 

Tout avouer et pas seulement le désespoir

Vice des faibles sans sommeil

 

Et pas seulement nos rêves

Vertu des forts anéantis

 

Mais le reflet brouillé la vilaine blessure

Du voyant dénaturé

 

Vous acceptez j’accepte d’être infirme

La même sueur baigne notre suicide

 

Mes vieux amis

 

Vieux innocents et vieux coupables

Dressés contre la solitude

 

Où s’allume notre folie

Où s’accuse notre impatience

 

Nous ne sommes seuls qu’ensemble

Nos amours se contredisent

 

Nous exigeons tout de rien

L’exception devient banale

 

Mais notre douleur aussi

Et notre déchéance

 

Nous nous réveillons impurs

Nous nous révélons obscurs

 

Brutes mentales du chaos

Vapeurs uniques de l’abîme

 

Dans la basse région lyrique

Où nous nous sommes réunis

 

Mes vieux amis pour être séparés

Pour être plus nombreux

 

Si nous montions d’un degré

 

Sur des filles couronnées

Une épave prend le large

 

À l’orient de mon destin

Aurai-je un frère demain

 

Sur des ruines virginales

Aux ailes de papillon

 

Friandises de l’hiver

Quand la mère joue la morte

 

Sans passion et sans dégoût

Une ruche couve lourde

Dans une poche gluante

 

Paume attachée à son bien

Comme la cruche à son eau

Et le printemps aux bourgeons

 

Fer épousé par la forge

Or maté en chambre forte

 

Nue inverse rocher souple

D’où rebondit la cascade

 

Simulacre du sein

Livré aux égoïstes

 

Mais aussi le sein offert

De l’image reconquise

 

Plaisir complet plaisir austère

Pommier noir aux pommes mûres

 

Belle belle rôde et jouit

Fluorescente dentelle

 

Où l’éclair est une aiguille

La pluie le fil

 

L’aile gauche du cœur

Se replie sur le cœur

 

Je vois brûler l’eau pure et l’herbe du matin

Je vais de fleur en fleur sur un corps auroral

Midi qui dort je veux l’entourer de clameurs

L’honorer dans son jour de senteurs de lueurs

 

Je ne me méfie plus je suis un fils de femme

La vacance de l’homme et le temps bonifié

La réplique grandiloquente

Des étoiles minuscules

 

Et nous montons

 

Les derniers arguments du néant sont vaincus

Et le dernier bourdonnement

Des pas revenant sur eux-mêmes

 

Peu à peu se décomposent

Les alphabets ânonnés

De l’histoire et des morales

Et la syntaxe soumise

Des souvenirs enseignés

 

Et c’est très vite

La liberté conquise

La liberté feuille de mai

Chauffée à blanc

Et le feu aux nuages

Et le feu aux oiseaux

Et le feu dans les caves

Et les hommes dehors

Et les hommes partout

Tenant toute la place

Abattant les murailles

Se partageant le pain

Dévêtant le soleil

S’embrassant sur le front

Habillant les orages

Et s’embrassant les mains

Faisant fleurir charnel

Et le temps et l’espace

 

Faisant chanter les verrous

Et respirer les poitrines

 

Les prunelles s’écarquillent

Les cachettes se dévoilent

 

La pauvreté rit aux larmes

De ses chagrins ridicules

Et minuit mûrit des fruits

Et midi mûrit des lunes

 

Tout se vide et se remplit

Au rythme de l’infini

Et disons la vérité

La jeunesse est un trésor

La vieillesse est un trésor

L’océan est un trésor

Et la terre est une mine

L’hiver est une fourrure

L’été une boisson fraîche

Et l’automne un lait d’accueil

 

Quant au printemps c’est l’aube

Et la bouche c’est l’aube

Et les yeux immortels

Ont la forme de tout

 

Nous deux toi toute nue

Moi tel que j’ai vécu

Toi la source du sang

Et moi les mains ouvertes

Comme des yeux

 

Nous deux nous ne vivons que pour être fidèles

À la vie

……

LE TRAVAIL DU POÈTE

À Guillevic.

I
 

Les belles manières d’être avec les autres

Sur l’herbe pelée en été

Sous des nuages blancs

 

Les belles manières d’être avec les femmes

Dans une maison grise et chaude

Sous un drap transparent

 

Les belles manières d’être avec soi-même

Devant la feuille blanche

 

Sous la menace d’impuissance

Entre deux temps et deux espaces

 

Entre l’ennui et la manie de vivre

 

II
 

Qu’êtes-vous venu prendre

Dans la chambre familière

 

Un livre qu’on n’ouvre jamais

 

Qu’êtes-vous venu dire

À la femme indiscrète

 

Ce qu’on ne peut pas répéter

 

Qu’êtes-vous venu voir

Dans ce lieu bien en vue

 

Ce que voient les aveugles

 

III
 

La route est courte

On arrive bien vite

Aux pierres de couleur

Puis

À la pierre vide

 

On arrive bien vite

Aux mots égaux

Aux mots sans poids

Puis

Aux mots sans suite

 

Parler sans avoir rien à dire

On a dépassé l’aube

Et ce n’est pas le jour

Et ce n’est pas la nuit

Rien c’est l’écho d’un pas sans fin

 

IV
 

Une année un jour lointains

Une promenade le cœur battant

Le paysage prolongeait

Nos paroles et nos gestes

L’allée s’en allait de nous

Les arbres nous grandissaient

Et nous calmions les rochers

 

C’est bien là que nous fûmes

Réglant toute chaleur

Toute clarté utile

C’est là que nous chantâmes

Le monde était intime

C’est là que nous aimâmes

 

Une foule nous précéda

 

Une foule nous suivit

Nous parcourut en chantant

Comme toujours quand le temps

Ne compte plus ni les hommes

Et que le cœur se repent

Et que le cœur se libère

 

V
 

Il y a plus longtemps encore

J’ai été seul

Et j’en frémis encore

 

Ô solitude simple

Ô négatrice du hasard charmant

J’avoue t’avoir connue

 

J’avoue avoir été abandonné

Et j’avoue même

Avoir abandonné ceux que j’aimais

 

Au cours des années tout s’est ordonné

Comme un ensemble de lueurs

Sur un fleuve de lumière

Comme les voiles des vaisseaux

Dans le beau temps protecteur

 

Comme les flammes dans le feu

Pour établir la chaleur

 

Au cours des années je t’ai retrouvée

Ô présence indéfinie

Volume espace de l’amour

 

Multiplié

 

VI
 

Je suis le jumeau des êtres que j’aime

Leur double en nature la meilleure preuve

De leur vérité je sauve la face

De ceux que j’ai choisis pour me justifier

 

Ils sont très nombreux ils sont innombrables

Ils vont par les rues pour eux et pour moi

Ils portent mon nom je porte le leur

Nous sommes les fruits semblables d’un arbre

 

Plus grand que nature et que toutes les preuves

 

VII
 

Je sais parce que je le dis

Que mes désirs ont raison

Je ne veux pas que nous passions

À la boue

Je veux que le soleil agisse

Sur nos douleurs qu’il nous anime

Vertigineusement

Je veux que nos mains et nos yeux

Reviennent de l’horreur ouvertes pures

 

Je sais parce que je le dis

Que ma colère a raison

Le ciel a été foulé la chair de l’homme

A été mise en pièces

Glacée soumise dispersée

 

Je veux qu’on lui rende justice

Une justice sans pitié

Et que l’on frappe en plein visage les bourreaux

Les maîtres sans racines parmi nous

 

Je sais parce que je le dis

Que mon désespoir a tort

Il y a partout des ventres tendres

Pour inventer des hommes

Pareils à moi

Mon orgueil n’a pas tort

Le monde ancien ne peut me toucher je suis libre

Je ne suis pas un fils de roi je suis un homme

Debout qu’on a voulu abattre

LE TRAVAIL DU PEINTRE

À Picasso.

I
 

Entoure ce citron de blanc d’œuf informe

Enrobe ce blanc d’œuf d’un azur souple et fin

La ligne droite et noire a beau venir de toi

L’aube est derrière ton tableau

 

Et des murs innombrables croulent

Derrière ton tableau et toi l’œil fixe

Comme un aveugle comme un fou

Tu dresses une haute épée vers le vide

 

Une main pourquoi pas une seconde main

Et pourquoi pas la bouche nue comme une plume

Pourquoi pas un sourire et pourquoi pas des larmes

Tout au bord de la toile où jouent les petits clous

 

Voici le jour d’autrui laisse aux ombres leur chance

Et d’un seul mouvement des paupières renonce

 

II
 

Tu dressais une haute épée

Comme un drapeau au vent contraire

Tu dressais ton regard contre l’ombre et le vent

Des ténèbres confondantes

 

Tu n’as pas voulu partager

Il n’y a rien à attendre de rien

La pierre ne tombera pas sur toi

Ni l’éloge complaisant

 

Dur contempteur avance en renonçant

Le plaisir naît au sein de ton refus

L’art pourrait être une grimace

Tu le réduis à n’être qu’une porte

 

Ouverte par laquelle entre la vie

 

III
 

Et l’image conventionnelle du raisin

Posé sur le tapis l’image

Conventionnelle de l’épée

Dressée vers le vide point d’exclamation

Point de stupeur et d’hébétude

Qui donc pourra me la reprocher

 

Qui donc pourra te reprocher la pose

Immémoriale de tout homme en proie à l’ombre

Les autres sont de l’ombre mais les autres portent

Un fardeau aussi lourd que le tien

Tu es une des branches de l’étoile d’ombre

Qui détermine la lumière

 

Ils ne nous font pas rire ceux qui parlent d’ombre

Dans les souterrains de la mort

Ceux qui croient au désastre et qui charment leur mort

De mille et une vanités sans une épine

Nous nous portons notre sac de charbon

À l’incendie qui nous confond

 

IV
 

Tout commence par des images

Disaient les fous frères de rien

Moi je relie par des images

Toutes les aubes au grand jour

 

J’ai la meilleure conscience

De nos désirs ils sont gentils

Doux et violents comme des faux

Dans l’herbe tendre et rougissante

 

Aujourd’hui nous voulons manger

Ensemble ou bien jouer et rire

Aujourd’hui je voudrais aller

En U.R.S.S. ou bien me reposer

 

Avec mon cœur à l’épousée

Avec le pouvoir de bien faire

Et l’espoir fort comme une gerbe

De mains liées sur un baiser

 

V
 

Picasso mon ami dément

Mon ami sage hors frontières

Il n’y a rien sur notre terre

Qui ne soit plus pur que ton nom

 

J’aime à le dire j’aime à dire

Que tous tes gestes sont signés

Car à partir de là les hommes

Sont justifiés à leur grandeur

 

Et leur grandeur est différente

Et leur grandeur est tout égale

Elle se tient sur le pavé

Elle se tient sur leurs désirs

 

VI
 

Toujours c’est une affaire d’algues

De chevelures de terrains

Une affaire d’amis sincères

Avec des fièvres de fruits mûrs

 

De morts anciennes de fleurs jeunes

Dans des bouquets incorruptibles

Et la vie donne tout son cœur

Et la mort donne son secret

 

Une affaire d’amis sincères

À travers les âges parents

La création quotidienne

Dans le bonjour indifférent

 

VII
 

Rideau il n’y a pas de rideau

Mais quelques marches à monter

Quelques marches à construire

Sans fatigue et sans soucis

Le travail deviendra un plaisir

Nous n’en avons jamais douté nous savons bien

Que la souffrance est en surcharge et nous voulons

Des textes neufs des toiles vierges après l’amour

 

Des yeux comme des enclumes

La vue comme l’horizon

Des mains au seuil de connaître

Comme biscuits dans du vin

 

Et le seul but d’être premier partout

Jour partagé caresse sans degré

Cher camarade à toi d’être premier

Dernier au monde en un monde premier.

À L’ÉCHELLE ANIMALE

I

Cette petite tache de lumière dans la campagne

Ce feu du soir est un serpent à la tête froide

La tache de la bête dans un paysage humain

Où tous les animaux sont les mouvements

De la terre bien réelle

Du soleil maigre et pâle

Du soleil gros et rouge

Et de la lune sans passé

Et de la lune à souvenirs

 

Cette petite tache de lumière cette fenêtre

Éclaire les épaules adorables d’un ours

Et d’un loup de Paris vieux de mille ans

Et d’un furieux sanglier d’aujourd’hui

Et d’un lièvre qui fuit comme un innocent

 

La forêt voilà la forêt

Malgré la nuit je la vois

Je la touche je la connais

Je fais la chasse à la forêt

Elle s’éclaire d’elle-même

Par ses frissons et par ses voix

 

Chaque arbre d’ombre et de reflets

Est un miroir pour les oiseaux

Et la rivière la rivière

Dont les poissons sont les bergers

Quelle rivière bien dressée

 

Voir clair dans l’œil droit des hiboux

Voir clair dans les gouttes de houx

Dans le terrier fourré d’obscurité fondante

Voir clair dans la main des taupes

Dans l’aile étendue très haut

Dans le gui des philosophes

Dans le tout cela des savants

Monde connu et naturel

 

Voir clair et se reconnaître

Sur la prairie bleue et verte

Où vont chevaux et perdreaux

Sur la plaine blanche et noire

Où vont corbeaux et renards

Voir clair dans le chant des crapauds

Dans le désordre des insectes

Dans les astres de la rosée

Dans les astres des œufs couvés

Dans la chaleur réglée et pure

Dans le vent dur du vieil hiver

Dans un monde mort et vivant

 

II
 

Le poids d’un chien sortant de l’eau

Comme un sourire ému d’une brouille d’amis

Miroirs brisés miroirs entiers

 

Le poids toujours nouveau

D’une chatte duvet

Les griffes sous la mousse

 

Et le poids flamboyant

D’une chatte écorchée

Par un fourreau d’aiguilles

 

Le poids du jour qui réfléchit

Et qui s’arrête comme un âne

À chaque pas

 

Et je ramasse avec lui

Les miettes de son effort

Sempiternel

 

D’où sommes-nous sinon d’ici

Et d’ailleurs toujours en butte

À ce compte monotone

D’armées et de solitaires

 

Bain d’abeilles paravent

De la poussière immuable

Balance des hirondelles

Dans une poitrine vide

 

Âne chèvre jusqu’à l’herbe

Rat de la poupe à la proue

Rossignol jusqu’au déluge

Jusqu’aux étoiles éteintes

 

Sont pesants les rongeurs

Pesants comme une horloge

Et les poissons pêchés

Et l’hermine par sa blancheur

Et le lièvre par son repos

 

Je suis avec toutes les bêtes

Pour m’oublier parmi les hommes

L’ÂGE DE LA VIE

À René Char.

I
 

Matin d’hiver matin d’été

Lèvres fermées et roses mûres

 

Déchirante étendue où la vue nous entraîne

Où la mer est en fuite où la plage est entière

 

Soir d’été ramassé dans la voix du tonnerre

La plaine brûle et meurt et renaît dans la nuit

 

Soir d’hiver aspiré par la glace implacable

La forêt nue est inondée de feuilles mortes

 

Balance des saisons insensible et vivante

Balance des saisons équilibrée par l’âge

 

II
 

Nous avons eu huit ans nous avons eu quinze ans

Et nous avons vieilli noirci l’aube et la vie

 

Les hommes et les femmes que nous n’aimions pas

Nous n’y pensions jamais ils ne faisaient pas d’ombre

 

Mais nous avons vieilli le gouffre s’est peuplé

Nous avons reproduit un avenir d’adultes

 

III
 

Pourtant ce tout petit miroir

Pour y voir en riant les deux yeux œil par œil

Et le nez sans rien d’autre

Et le bout de l’oreille et le temps de bouder

Ce miroir sans limites

Où nous ne faisions qu’un avec notre univers

 

Ce tout petit miroir où jouaient avec nous

Une par une mille filles

Mille promesses définies

 

IV
 

De la douce et de l’extrême

Nous confondions les couleurs

 

Toutes étaient inutiles

Et nous à quoi servions-nous

 

Tous et toutes grains de sable

Impalpables dans le vent

 

Tous et toutes étincelles

Sous une ombrelle de feu

 

Sommes-nous hommes et femmes

De ces enfants que nous fûmes

 

Le vent s’est désorienté

La lumière s’est brouillée

 

Un rien nous tient immobiles

Réfléchissant dans le noir

 

V
 

Les jouets et les jeux sont changés en outils

En travaux en objets capitaux en soucis

 

Il nous faut nous cacher pour simuler l’enfance

Il nous est interdit de rire sans raison

 

Sur la courbe du jour le soleil de la mort

Tisse un épais vitrail de beautés bien vêtues

Nous n’avons que deux mains nous n’avons qu’une tête

Car nous avons appris à compter à réduire

 

Nuages de santé brumes de jouissance

À mi-chemin de tout murmure du plaisir

Le printemps diminue l’hiver est supportable

Combien de nuits encore à rêver d’innocence

 

VI
 

D’innocence et de force sur les tremplins

De l’espoir et de la confiance

 

De force et de faiblesse mon ami massif

Violent et subtil

Juste et vivant depuis longtemps

 

Depuis aussi longtemps que moi

Puisque nous avons été jeunes

En des saisons si différentes

 

Mais jeunes comme on ne l’est pas

À chercher sur tous les chemins

Les traces de notre durée

 

Nous n’aurons pas toujours cent ans

 

L’espoir un jour ira comme la foudre

Fera lever les moissons abattues

Et rayonner le plomb de nos désastres

 

La vieillesse est déjà d’hier

 

VII
 

En dépit des pierres

À figure d’homme

Nous rirons encore

 

En dépit des cœurs

Noués et mortels

Nous vivons d’espoir

 

Rien ne nous réduit

À dormir sans rêves

À supporter l’ombre

 

Il n’y a sur l’heure

Doute ni soupçon

D’une heure semblable

 

À jamais sur terre

Tout remue et chante

Change et prend plaisir

FIN

Date de dernière mise à jour : 25/08/2023