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BIBLIOBUS Littérature

Vigne vierge d'automne - Sabine Sicaud (1913-1928)

 

Vous laissez tomber vos mains rouges,

Vigne vierge, vous les laissez tomber

Comme si tout le sang du monde était sur elles.

À leur frisson, toute la balustrade bouge,

Tout le mur saigne,

Ô vigne vierge. . . Tout le ciel est imbibé

D’une même lumière rouge.

C’est comme un tremblement d’ailes rouges qui tombent,

D’ailes d’oiseaux des îles, d’ailes

Qui saignent. C’est la fin d’un règne-

Ou quelque chose de plus simple infiniment.

Ce sont les pieds palmés de hauts flamants

Ou de fragiles pattes de colombes

Qui marchent dans l’allée.

(Où vont-elles, si rouges?)

Leurs traces étoilées

Rejoignent l’autre vigne, où l’on vendange.

Si rouge,

Est-ce déjà le sang des cuves pleines?

Ah! simplement la fête des vendanges,

Simplement n’est-ce pas?

Et pourtant, que vos mains sont tremblantes! Leurs veines

Se rompent une à une. . . Tant de sang. . .

Et cette odeur si fade, étrange.

Ces mains qui tombent d’un air las,

Ô vigne vierge, d’un air las et comme absent,

Ces mains abandonnées. . .

(Lady Macbeth n’eut-elle pas ce geste

Après avoir frotté la tache si longtemps?)

Mains qui se crispent, mains qui restent

En lambeaux rouges sur octobre palpitant;

Dites, oh! dites chaque année

Êtes-vous les mains meurtrières de l’Automne?

Ou chaque année,

Sans rien qui s’en émeuve ni personne,

Des mains assassinées

Qui flottent au fil rouge de l’automne?

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