Créer un site internet
BIBLIOBUS Littérature française

Un Monsieur qui prend la mouche - Marc-Michel et Eugène Labiche.

 

– Monsieur ! dit Arnal.

– Monsieur ! dit Leclère.

– Monsieur, c’était le soir. Le crépuscule étendait son écharpe violette. Les derniers glacis de rose s’éteignaient au faite des maisons.

– Passons.

– Passons. Un monsieur passe… Je vous ennuie ? Je m’en vais.

– Continuez.

– Je le salue. Je suis très-poli, moi, monsieur ! Il ne me rend pas mon salut. Je cours après lui. Je m’étais trompé. Je ne le connaissais pas ; mais je l’avais salué. Je le prie de me rendre mon salut. Refus, injures, soufflet.

– Qu’est-ce que ça me fait ?

– Je vous ennuie, je m’en vais.

– Continuez

– Et procès. Très-bien ! Je prends un avocat. Cet animal, – mon avocat, – me fait acquitter.

– Monsieur !

- Il me fait acquitter, monsieur, mais en m’injuriant trois quarts d’heure ! Il dit au tribunal que j’ai un mauvais caractère, que je suis bilieux, sanguin, que je prends la mouche, etc… je vous ennuie ?

– Finissez !

– Je vais chez cet animal, – mon avocat. – Je lui flanque cinq cents francs et une paire de gifles. Duel. Il se retourne. Je le blesse dans le gras. Je vous ennuie, je m’en vais.

– Je ne vous retiens pas, dit Leclère.

Arnal s’en va. Il revient.

– Pardon, monsieur.

– Ah ! encore ? dit Leclère.

- Monsieur, j’avais oublié de vous dire que cet animal, – mon avocat, – est M. Savoyard, qui doit épouser aujourd’hui votre fille. Il en a pour trois mois. Monsieur, j’ai bien l’honneur de vous saluer.

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021