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BIBLIOBUS Littérature française

F

 

FANON s. m. le devant d'un bœuf, d'un taureau. Rampale dans ses Idiles a dit, la peau d'un gras fanon lui bat sur les genoux. Les Latins l'appellent Paleare.

Fanon en termes de manége se dit d'un gros toupet de poil ou de crin, qui vient au derriére du Boulet de plusieurs chevaux. Les chevaux de carrosse ont souvent de gros fanons.

Fanon, se dit aussi des barbes de Baleine, qui pendent des deux côtez de la gueule de ce monstre: le cent pesant de fanons de Baleine a été réglé par Arrêt du Conseil à 67l. 10. sols: c'est ce qui sert à mettre dans le corps de juppe des femmes & à plusieurs sortes d'ouvrages, où on a besoin d'une matiére pliante & qui fasse ressort.

Fanon en termes de marine est un racourcissement du point d'une voile & particuliérement de celle d'Artimon, lors qu'on la trousse & ramasse avec des garcettes, pour prendre moins de vent. Ces fanons sont des bouts de corde divisez en plusieurs articles ou marticles attachez aux grandes voiles, qui les embrassent & serrent quand il est de besoin.

Fanon en termes d'Eglises signifie un manipule ou ornement sacerdotal, que les Prêtres, les Diacres & soûdiacres mettent au bras gauche en officiant: il est fait en forme de petite étole. Voyez manipule où on a fait voir que c'étoit autrefois une espéce de mouchoir blanc, comme témoigne Durandus: son primitif est Pannus, dont les Allemans ont fait fanus, parce qu'ils changent ordinairement le p. en f.

Fanon se dit aussi des deux pendants, qui sont au derriére de la Mître d'un Evêque, & aussi du bonnet ou de la Couronne de l'Empereur.

Fanon, en termes de blason est un large brasselet fait à la maniére du fanon de Prêtre pendant du bras droit, au lieu que celui du Prêtre pend du bras gauche: c'étoit autrefois une manche pendante qu'on portoit prés du poignet sur tout en Allemagne d'où ce nom nous est venu, parce que les Allemans appellent fanen une piéce de linge ou d'étoffe, & quelquefois une banniére, on l'appelle autrement Dextrochere.

Fanon se prend aussi quelquefois pour gonfanon, voyez gonfanon; & en ce sens Borel le dérive du  grec phaino, appareo, parce qu'on le void de loin étant au bout d'une pique.

FAUCON s. m. Oiseau de leurre, qui a le plus beau vol & qui est le plus noble & le plus estimé entre les oiseaux de proye, c'est pourquoi il donne le nom à la fauconnerie, il a les pieds jaunes, la tête noire, & est semé sur le dos de plusieurs taches. Le bon faucon a la tête ronde, le bec court & gros, le col long, les épaules larges, les pennes des aîles subtiles & déliées, les cuisses longues, les jambes courtes, les pieds, ou mains longs, larges & grands: il y a des faucons riviereux, d'autres champêtres propres à voler sur les riviéres ou les campagnes, en Latin falco, triorches, buteo, & en général accipiter, qui est le nom de la meilleure espéce, qui l'a donné aux autres.

Faucon pelerin, est celui qui vient des païs lointains, dont on ne trouve point l'aire, qui est pris depuis le mois d'Octobre jusqu'en Janvier.

Faucon gentil, de passage, qui vient des païs circonvoisins, le plus aisé à dresser, qui est pris en Août ou en Septembre; ce mot vient de Gentilis.

Faucon niais, qui n'a jamais été à soi qui est pris au nid, ou dans le roc quand il est fort petit, on l'appelle aussi faucon Royal, parce qu'on l'éleve facilement.

Faucon sor, c'est un faucon qui a encore son premier plumage, les pennes du premier an.

Faucon hagard, c'est à dire, fier & bisarre celui qui n'est plus sor quand on le prend, qui a mué ou changé de plumes, on l'appelle aussi faucon de repaire.

Faucon antanaire ou antenaire, qui est pris au printemps avant la muë.

Faucon mué en main d'homme se dit simplement du faucon mué; quand il est mué des champs  & puis pris au passage il se dit ardoisé, madré ou fleuri, hors de connoissance, & vieil faucon.

Faucon tagarot, c'est un oiseau fort long & flouet, d'une espéce particuliére, on l'apporte du côté d'Egypte.

Faucon Tartaret, qui vient de Tartarie, c'est un grand oiseau dit de haute maille, appellé des Turcs faucon sahin.

Faucons Balarins, qui viennent de Hongrie sont des faucons communs petits, de pennage brun avec la tête noire.

Faucon familleux, c'est un faucon famelic, ou sujet à la faim.

Le Faucon montanier est brun & hardi, & se doit entretenir entre gras & maigre.

Le Faucon Thunisien, qui vient de Thunis, nommé autrement alphanet de alpha, parce que les Grecs le mettent au premier rang des faucons. Il y a des faucons qu'on appelle du Perou, & autrement neblies, qui volent plus haut que les autres, qui ont des serres fortes & une couleur tirant sur le noir.

Le gerfaut, le sacre, le lanier sont des espéces de faucons.

Faucon. Terme d'artillerie espéce de Canon qui a trois pouces de diamêtre & qui porte une livre & demie de balle.

Fauconneau s. m. piéce d'artillerie, qui tient le sixiéme rang entre les Canons, qui a six à sept pieds de long, & deux pouces de diamêtre, dont la balle pese environ une livre & demie, mais selon Hanzelet c'est une huitiéme de coulevrine qui a 35. calibres de long, qui tire deux livres & demie de fer avec deux livres de poudre, & le bâtard à 30. calibres, tire trois livres de fer avec autant de poudre.

Fauconneau chez les maçons, est la piéce de  bois la plus haute d'un engin à élever des fardeaux, elle porte les deux poulies par où passent les cables.

Fauconnerie s. f. l'art de dresser, d'affaiter, de gouverner, d'apprivoiser & d'assûrer les oiseaux de proye, Desparon a bien écrit de la fauconnerie.

Fauconnerie se dit aussi de l'équipage de la chasse, qui se fait avec les oiseaux. Ce Prince aime la fauconnerie, il a beaucoup d'Officiers de fauconnerie. La fauconnerie du Roi est en tel endroit.

Fauconnier s. m. affaiteur, ou apprivoiseur d'oiseaux, celui qui dresse & qui gouverne, ou qui a le soin des oiseaux de proye, des gants de fauconnier. Le grand Seigneur entretient ordinairement six mille fauconniers & le moins qu'il en ait eu c'est trois mille.

On appelle chez le Roi le grand fauconnier, l'officier qui a soin de toute sa fauconnerie.

On dit en termes de manége, monter à cheval en fauconnier, pour dire monter du pied droit.

Fauconniere s. f. poche ou bourse de fauconnier.

On appelle aussi fauconniére une espéce de Bissac de cuir ou double gibeciére qu'on porte à cheval & qu'on met des deux côtez de l'arçon de la selle, où on serre les menuës hardes nécessaires pour un voyage.

FEU. s. m. Element chaud & sec, qui entre en la composition de tous les corps naturels, & sur tout de ceux qui sont animez. Les anciens ont crû qu'il y avoit un feu élementaire dans le concave de la Lune, ce qui est une pure vision établie sans fondement. Le feu n'est autre chose qu'une matiére fort subtile & violemment agitée. Le feu est le plus violent de tous les acides. Dans les forges on n'employe que du feu de Charbon, dans les Verreries que du feu de bois sec; dans les Chambres on allume du feu clair, du feu de fagot quand on veut prendre l'air du feu, une poignée de feu. Les pauvres font du feu de tourbes & de mottes. Les volcans sont de grands gouffres de feu, des feux soûterrains qui sortent de temps en temps. On fait du feu avec des pierres, avec un fuzil. Aux Indes Orientales on en fait en frottant deux morceaux de bois de Candou l'un contre l'autre. Aux Occidentales avec un autre bois qu'on appelle Ticaca, qui ressemble à la canelle & qui sert de fuzil. Mathiole dit que les Anciens avant l'invention de l'Acier, tiroient le feu d'un bois dur, frotté avec un bois tendre & spongieux, tel que le bois de la vigne sauvage.

Feu, en termes de Chymie, se dit des degrez de la chaleur, qui servent à en faire les operations. Ainsi les Chymistes appellent feu de digestion, le fumier qu'ils nomment autrement ventre de Cheval, dont la chaleur est telle qu'on ne sçauroit tenir la main dans le milieu d'un grand tas de fumier échauffé, ni souffrir dans la main une verge de fer qu'on y aura introduite & tenuë quelques momens. Le second feu est celui du bain vaporeux, du Bain marie, du Bain de cendre, du Bain de sable, du Bain de limaille & autres qui sont expliquez à Bain. Le troisiéme est le feu ordinaire qu'on applique sous le Vaisseau. Le quatriéme feu est le feu de Lampe qui est moderé & égal, qu'on peut augmenter par la grosseur & le nombre des méches qu'on allume, c'est celui qui sert aux Emailleurs. Le cinquiéme est le feu de Roüe qu'on allume en rond autour d'un Creuset,  qu'on approche peu à peu autour du vaisseau également & pour l'échauffer. Le sixiéme feu est nommé de suppression, qui se donne lorsque non seulement on environne le vaisseau, mais aussi lors qu'on le couvre tout à fait de charbons allumez, dont on augmente la force suivant le besoin. Le septiéme feu, est celui de Reverbere clos, qui se fait dans un fourneau, où non seulement il frappe le vaisseau, mais encore il le refléchit & le refrappe par dessus & tout autour: il y a encore feu de Reverbere ouvert, qui se fait dans un fourneau qui n'a point de couverture. Le huitiéme feu est le feu de flame ou de fusion, qui se fait pour la fusion & calcination des Métaux & Mineraux, on l'appelle aussi feu d'atteinte. Le neuviéme feu est celui des grandes Verreries, qui sert à vitrifier les Cendres des plantes, les sables & les caillous, qui est plus violent que tous les autres.

On dit mesurer le feu, donner le feu par degrez, pour dire le donner plus ou moins violent, en ouvrant ou fermant les registres ou trous du fourneau, & on l'appelle alors un feu gradué.

On croit aussi en Chymie qu'il y a un feu central qui cuit & produit les métaux & les mineraux qu'on nomme l'Archée. On dit aussi qu'on éprouve les métaux par le feu, qu'il faut qu'ils souffrent le feu, pour dire la coupelle: en d'autres occasions on dit qu'il faut qu'ils passent par le feu, sur le feu, pour les purger du mauvais air.

On a vû ces derniéres années quelques Charlatans à Paris qui ont mangé du feu, qui ont marché sur le feu, qui ont lavé leurs mains de plomb fondu; ce qui n'est pas un secret nouveau, puis qu'Ambroise Paré dit avoir éprouvé lui-même, qu'aprés avoir lavé ses mains de son urine, ou bien avec de l'unguentum aureum, on les peut laver seurement de plomb fondu. Il dit aussi qu'il fit distiller du lard fondu avec une pelle rouge sur ses mains, aprés les avoir lavées avec du jus d'oignon.

Feu, signifie aussi incendie, embrasement. Le feu a pris à la maison, à la cheminée. On sonne le tocsin, on crie au feu quand le feu est quelque part. Une petite bluette, une étincelle de feu cause souvent une grande incendie. Il a fallu abattre ce corps de logis à cause que le feu gagnoit.

Feux d'artifice ou feux de joïe, sont des feux faits artistement avec de la poudre à Canon, qu'on tire dans les réjouïssances publiques, ou dans les régals magnifiques. Ils sont composez de fusées volantes, saucissons, petards, lances à feu, pots à feu, girandoles, &c. Et accompagnez pour l'ornement de plusieurs figures & devises. On fait à la gréve un feu de joïe la veille de la Saint Jean, on en fait aux naissances, entrées & mariages des Rois, dont les compositions se trouvent dans les pyrotecnies de Hanzelet, Vanoccio, Malthus, & sur tout de Casimir simieirowies Polonnois, qui en a fait un excellent Livre in folio. On dit aussi au figuré qu'un homme fait des feux de joïe dans son cœur, quand il se réjouït secrettement dans son ame de quelque chose qui est arrivée.

Feu, se dit souvent en termes de guerre. On voyoit les feux de l'Armée, c'est à dire, les feux qu'on allume la nuit dans un Camp. Les Armes à feu sont celles qu'on charge de poudre, comme pistolets, mousquets, fusils, carabines, canons, grenades, bombes & carcasses, on les appelle quelquefois bâtons à feu. On dit des Villes prises d'assaut, qu'on y a mis tout à feu & à sang. Le feu de la place, c'est le flanc, ou la partie de la courtine où aboutit la ligne de défense, d'où on a fait feu pour défendre la face du Bastion opposé: la meilleure façon de fortifier est celle qui donne plus de feu, en cet Assaut la courtine étoit toute en feu, il falut soûtenir, essuyer le feu de cette demi-lune. Cette trenchée étoit en filée, exposée au feu de la place.

On appelle feu gregeois un feu d'artifice qui brûle dans l'eau, qu'on dit avoir été inventé par Callinicus, vers l'an de grace 660. comme remarque le P. Petault fondé sur l'autorité de Nicetas & de Zonare: ce fut par son moyen que l'Empereur Constantin Pogonat ou Barbu défit les Agarennes ou Sarrasins qui le tenoient assiégé à Constantinople. Il est inextinguible, si ce n'est avec du sable, du vinaigre, ou des cuirs verds. Mais d'autres soûtiennent qu'il est plus ancien, & qu'il fut inventé par Marcus Gracchus: en effet il y a quelques Auteurs qui font mention que les Grecs & les Romains s'en sont servis dans leurs guerres, pour attaquer & défendre les Places & les Vaisseaux.

On dit d'un homme brave & intrépide qu'il ne craint point le feu, qu'il va au feu comme à la nopce.

Feu, signifie quelquefois simplement la lumiére d'une bougie, d'une chandelle, d'un flambeau. Dans les Villes policées il est défendu de marcher la nuit sans feu, sans flambeau & sans lanterne. On demande du feu pour cacheter une lettre. Les fermes du Roi s'adjugent au premier feu, au second feu, c'est à dire, à l'extinction de la premiére ou seconde bougie qu'on allume pendant les Enchéres. Il est défendu de pêcher, de chasser au feu, c'est à dire, la nuit avec de la lumiére.

Feu, en termes de Marine signifie le fanal ou lanterne, qui est sur la pouppe des Vaisseaux pour servir de guide la nuit. L'Amiral porte quatre feux, fanal de quatre feux. Le Vice-Amiral, le Contre-Amiral, & chef d'Escadre en portent chacun trois, les autres Vaisseaux n'en portent qu'un; le feu sert aussi de signal pour régler la route, la voilure & la manœuvre: on le met en divers endroits & aux haubans de divers mats, suivant qu'il a été concerté entre les Officiers. On dit des grands vaisseaux qu'ils ne craignent que la terre & le feu, un Corsaire qui craint la corde s'il est pris, met le feu aux poudres & fait sauter le Vaisseau. On appelle aussi feux, ces fanaux qui sont allumez sur le haut d'une tour, sur la côte ou à l'entrée des Ports & des Riviéres pour éclairer & guider pendant la nuit les vaisseaux dans leur route.

Feu, signifie quelquefois la cheminée. Il y a tant de feux en cette maison, c'est à dire, tant de chambres à feu ou à cheminées, quelquefois il se dit du feu actuel qu'on entretient dans un âtre. Il me faut 20. voïes de bois par an, car j'ai toûjours deux feux jour & nuit; quelquefois il se dit des utenciles qui servent à attiser, détiser, entretenir & souffler le feu, comme grille, pelle, pincettes, tenailles, soufflet. Un feu garni d'argent.

Feu. Se dit quelquefois aussi d'un ménage, de toute une famille, il y a tant de feux en cette Paroisse. Le beaupere & son gendre ne font qu'un feu, c'est à dire, vivent ensemble, ne font qu'un ménage: ce mot vient du latin focus.

Feu. En termes de Théologie, se dit des feux immateriels dont Dieu se sert pour punir les méchans. Les feux d'Enfer, & du Purgatoire  sont des feux inextinguibles qui brûlent les malheureux sans les consumer. Le monde doit périr par un deluge de feu. Sodome & Gomorre furent punis par le feu du Ciel: ils avoient fait des crimes qui méritoient le feu. Dieu apparut à Moïse sous la figure d'un feu ardent en un buisson, le S. Esprit descendit sur les Apôtres en langue de feu. Le Camp des Israëlites étoit guidé par une colonne de feu. Les Hebreux conservoient un feu sacré dans le Temple. Les Payens ont adoré le feu. Les Vestales gardoient le feu sacré des Romains. Les Perses ont encore des feux qui brûlent depuis plus de mille ans sur des montagnes.

Feu. Se dit aussi des Astres & des Méteores. Les Poëtes appellent tous les Astres les feux du firmament, les feux de la nuit, des globes de feu. La Lune est un des moindres feux du Ciel, les feux follets ou ardens sont des exhalaisons qui s'enflamment. On dit que le Ciel est tout en feu, pour dire qu'il tonne & éclaire beaucoup. On appelle sur la mer le feu saint Elme, certains feux volans autour des mâts & des manœuvres, & de la cage, causez apparemment par quelques exhalaisons qui restent aprés une tempête & qui en présagent la fin. Les Mariniers les appellent saint Nicolas, sainte Claire, sainte Helene. Les Italiens hermo, les Castillans san Elmo, les Anciens Castor & Pollux: quand il n'en paroît qu'un on l'appelle furolle ou helene, ce qu'on tient de mauvais présage, quand il en paroît deux les Mariniers s'en réjouïssent & les saluent avec leurs sifflets.

Feu. Se dit aussi en Médecine & en Chirurgie. Le feu saint Antoine étoit autrefois une maladie fort dangereuse. Le feu volage est une espece de dartre qui s'enflamme & qui vient sur tout au visage. On ôte le vin aux malades de crainte de mettre le feu dans une playe, d'augmenter le feu de la fiévre. L'Arsenic met le feu dans la bouche, dans les entrailles. Il y a des playes qui ne se guérissent qu'avec le feu. Le feu actuel est un bouton de feu, un fer chaud. Un feu potentiel est celui qui est enfermé dans les remédes caustiques comme les cauteres, & en quelques minéraux ou plantes corrosives. On dit aussi donner le feu à un Cheval, quand on lui applique un bouton ou un couteau de feu pour le guérir du farcin ou de quelques autres maladies.

Feu. Se dit en termes de Lapidaires, de l'éclat, de la vivacité de quelque corps, de la lumiére qu'il jette ou qu'il refléchit. Un Diamant fin jette bien du feu, de l'éclat. L'Escarboucle est une pierre imaginaire qu'on dit jetter assez de feu pour éclairer une chambre. Des yeux vifs & brillans jettent du feu. Les vers luisans, la pierre de Boulogne, le phosphore la nuit jettent du feu. On appelle couleur de feu un rouge vif & foncé qui a l'éclat du feu.

Feu. Se dit aussi de certains poils roux qui viennent autour des yeux des petits Chiens, qui les font beaucoup estimer par ceux qui en sont curieux.

Feu. Se dit figurément en choses spirituelles & morales de la vivacité de l'esprit, de l'ardeur des passions. Cet Avocat a bien du feu, c'est un esprit tout de feu. Ce Poëte n'a point de genie, il n'eut jamais de feu. Le feu brille par tout dans ses écrits. Il a l'ame échauffée d'un beau feu, d'un noble feu.

On dit d'un homme en colere qu'il a les yeux tout en feu, que le feu lui a monté au visage, qu'il jette feu & flammes, qu'il lui faut laisser jetter son feu. On dit aussi d'un homme amoureux qu'il brûle d'un beau feu, qu'il nourrit un feu discret, un feu caché sous la cendre, un feu qui le devore. La bonne morale veut qu'on éteigne le feu de la concupiscence. On dit aussi brûler d'un feu divin, d'un feu celeste, d'un amour divin. On dit en ce sens qu'il faut laisser passer le feu de la jeunesse, ses emportemens. Le feu se dit aussi du courage. On a du mal à soûtenir le premier feu, la premiére impetuosité des François.

Feu. Se dit aussi des troubles, des séditions. Pendant les Guerres des Huguenots tout le Royaume étoit en feu. Des Prédicateurs séditieux mettoient le feu par tout, le Roi a éteint enfin le feu de la sédition. Quand on use en ces occasions de remédes violens, on dit qu'il y faut appliquer le fer & le feu.

On dit au lansquenet que le premier Roi qui viendra fera feu, pour dire qu'il fera gagner ou perdre quelque coup notable.

Feu. Se dit proverbialement en ces phrases. Un feu à rôtir un bœuf, c'est un grand feu de reculée. On dit aussi il n'est feu que de gros bois. On dit des débauchez qu'ils font grande chere & bon feu. On dit aussi qu'un homme a mis le feu à la cheminée, pour dire qu'il a mangé des viandes trop salées & trop épicées, & qu'il s'est mis le gosier, le palais en feu. On dit aussi c'est un feu de paille, d'une émotion qui ne dure pas long-temps, d'une entreprise qu'on n'achevera point. On dit aussi faire du feu violet pour dire faire quelque chose avec vigueur, ou éclat, à cause que le feu de bois vert qui est le plus violent tire sur le violet. On dit encore le bois tortu fait le feu droit. On dit d'un homme qui s'enfuit fort vîte, qu'il court comme s'il avoit le feu au cul. On dit de deux personnes ennemies qui ne se sçauroient souffrir, que c'est le feu & l'eau. On dit aussi dites-lui cela & vous allez chauffer au coin de son feu, pour dire allez lui reprocher cela en face. On dit d'une maison qu'on trouve en desordre, qu'il n'y a ni pot au feu, ni écuelles lavées. On dit d'un homme fort pauvre qu'il n'a ni feu ni lieu, quand il n'a aucune retraite, aucune demeure assurée. On dit de celui qui n'a point voyagé, ni n'a point vû le grand monde, qu'il n'a jamais bougé du coin de son feu. On dit faire mourir quelqu'un à petit feu, pour dire le faire languir dans une longue attente d'une chose dont il a besoin. On dit que le feu ne va point sans fumée, pour dire qu'il paroît toujours quelque signe au dehors d'une violente passion qu'on a dans l'ame, & qu'il y a toûjours quelque chose de vrai de ce qu'on dit publiquement. On dit encore mettre les fers au feu, en parlant d'une affaire, pour dire commencer à la remuer, ou s'y appliquer vigoureusement. On dit aussi, que le feu est à une marchandise, pour dire, qu'il y a presse à l'acheter qu'on y court comme au feu. On dit mettre le feu aux étouppes, mettre le feu aux poudres, jetter de l'huile sur le feu, mettre le feu sous le ventre à quelqu'un: pour dire l'exciter, l'encourager à faire quelque action, à laquelle il étoit déja porté d'ailleurs, animer sa colére, sa passion. On dit, qu'un homme se mettroit au feu pour son ami, pour dire qu'il est prêt de le servir dans les choses les plus difficiles; & qu'il mettroit sa main au feu, son doigt au feu, quand il propose quelque chose dont il est trés-assuré: ce proverbe se dit par allusion à une coûtume qu'on avoit autrefois, de se purger d'une accusation par l'attouchement du fer chaud. Cunegonde femme de l'Empereur Henri de Baviére se purgea du soupçon que son mari avoit contre 107 elle, en marchant les pieds nuds sur 12 socs de charruë ardens.

Feu. Feuë. Subst. terme indéclinable dont on se sert en parlant des défunts, dont la mémoire est encore assez récente. Le feu Roi se dit du Roi dernier mort; la feuë Reine. Feu mon pere, mon oncle. Les Notaires de quelques Provinces disent encore au plurier furent en parlant de deux personnes conjointes & décedées, ce qui marque que ce mot vient de fuit & de fuerunt, néanmoins, Ménage prétend avec quelque apparence qu'il vient de functus, au lieu de fato functus.

S'il se trouve quelque conformité en cet endroit avec le Dictionnaire de l'Academie, le Lecteur n'en doit pas être surpris, puisque c'est le même Auteur qui en a fait le canevas, dont la minute qui est écrite de sa main peut faire foi. Ce mot qui apparemment se fera distinguer des autres, doit suffire pour faire cesser le reproche qui lui est fait de n'avoir pas voulu communiquer ses lumiéres à la compagnie, puis qu'il n'en a pas été chiche toutes les fois qu'on les a voulu recevoir.

Fief s. m. Terre, Seigneurie, ou droits qu'un Seigneur dominant donne à un vassal à la charge de foi & hommage avec quelques redevances. Les fiefs n'étoient point connus dans le droit Romain, mais ils sont établis dans toutes les Coûtumes de France, & plusieurs tiennent qu'ils sont venus des Lombards. Pasquier soûtient le contraire & prouve par un passage d'Aimoin qu'ils étoient en usage en France dés le temps de Clovis. On possede en fief non seulement des heritages, mais des droits incorporels, comme dîmes, champarts & autres redevances & même des Offices & dignitez. Ce mot est dérivé selon quelques-uns de fœdus comme venant d'un traité & d'une Alliance faite avec le Seigneur; les 108 autres de fides, à cause de la foi qu'on est obligé de porter & de garder à celui dont on releve; Bodin tient que le mot fedum latin vient par la contraction de ces lettres initiales, fidelis ero domino vero meo, qui est une ancienne formule de la foi & hommage; Nicod tient qu'il vient de felo Allemand signifiant la même chose; d'autres de foden qui signifie nourrir, ou du saxon feod qui signifie stipendium, le fief étant une espéce de prébende pour vivre; on a commencé de se servir de ce mot sous Charles le Gros. Fief dominant est celui à qui on doit foi & hommage; fief servant, celui qui releve d'un autre fief, ou qui n'a sous soi que des rotures.

Un fief en nuesse ou de Hautbert, est celui qui reléve de la Couronne nuëment & immédiatement, ce qu'on appelle aussi de nud à nud, qui tient du Roi sa Seigneurie en plein fief, ce qu'on appelle aussi fief chevel. Fief noble, est celui qui est tenu en plein hommage, ou en pairie, ou en plein lige, où il y a Justice, Maison ou Château notable, motte, fossez ou autres signes de noblesse & d'ancienneté, on appelle les autres fiefs ruraux & non nobles qu'on appelle quelquefois fiefs restraints ou abregez. On a appelé aussi fiefs roturiers, des mairies, & fiefs boursiers ou boursaux, des fiefs acquis de bourse roturiére qu'on appelle en plusieurs lieux coûtumiére; les portions de fief qui appartiennent aux aînez s'appellent aussi Bourseaux en la Coûtume du grand perche. Franc fief, cette épithete est donnée aux fiefs, parce qu'ils ne doivent être tenus que par des personnes franches & nobles de race ou annoblies, qui sont franches libres & exemptes de tailles, aides & subsides, & on appelle francs fiefs & nouveaux acquets, la taxe qu'on fait tous les 30 ou 40 ans sur les roturiers, les Eglises, les 109 Communautez & gens de main morte pour les fiefs qu'ils tiennent, ou qu'ils ont acquis de nouveau, qui ne sont point amortis, afin qu'ils ne soient point obligez d'en vuider leurs mains; cette taxe se fait sur le pied du revenu de six années à l'égard des fiefs qui sont tenus du Roi nuëment, & de trois ans à l'égard de ceux qui n'en relevent qu'en arriére fief. Pied de fief est un fief dépecé & démembré dont il est fait souvent mention en la Coûtume de Tours.

Fief de danger est celui dont on ne peut prendre possession qu'aprés avoir fait la foi & hommage, & qu'on ne peut aliener sans le congé du Seigneur, autrement il est confisqué.

Il y a des fiefs à vie, d'autres qu'on appelle fiefs morts qui sont des heritages tenus à rente seche, qui ne portent point de profit de cens, ni de rente fonciére. On dit, qu'un Seigneur de son domaine fait son fief quand de son plein fief il en donne une partie à un vassal pour en faire un arriére fief, & au contraire, que de son fief il fait son domaine, quand il y réünit un arriére fief, ou quand il le retire par puissance de fief. Il y a aussi des fiefs en régale, ou des fiefs de dignité comme étoit autrefois la charge de Connêtable que le Roi donnoit en fief, & dont on lui faisoit foi & hommage.

Fief en l'air, c'est un fief qui n'a point de Château ou principal manoir où les tenanciers soient obligez de venir faire les devoirs & payer les droits.

Profit de fief, se dit des droits Seigneuriaux, comme quints & requints, rachats, laods & ventes qui se payent à chaque mutation des heritages ou fiefs servans quand le fief est ouvert ou vacant. On dit aussi qu'un Seigneur peut se joüer de son fief, pour dire le démembrer.

Puissance de fief, est un droit Seigneurial qui donne pouvoir à un Seigneur de retirer & de prendre un heritage dépendant de lui, pour le même prix qu'il est vendu à un étranger, & non lignager de celui qui vend, ou du vassal.

Commise de fief, c'est la dénégation que fait un vassal de tenir un fief de son Seigneur, ce qui en emporte confiscation, d'où est venu ce proverbe qui fief nie, ou fief rogne, perd son fief.

Arriére fief, est un fief relevant d'un autre fief, lequel en a encore un autre au-dessus de lui.

Fieffer. v. act. donner en fief une terre, un droit à la charge de foi & hommage, & de quelque redevance.

Fieffé, ée. part. un Officier, un Sergent fieffé, sont ceux qui dépendent d'un fief. Il y a quantité d'Offices fieffez & hereditaires. On a appellé Tailleur fieffé, celui qui tenoit en foi & hommage du Roi le pouvoir de tailler les monnoyes de France. On dit aussi par injure & exaggeration, un coquin fieffé, une coquette fieffée, de ceux qui font profession d'être malhonnêtes gens ou qui sont galantes de profession.

FOYER s. m. l'âtre de la cheminée d'une chambre où on fait le feu. Les Penates des anciens étoient appellez les Dieux des foyers. Ce mot vient du latin foculare. Ménage.

Foyer se prend quelquefois pour la maison. Ce Gentilhomme a envoyé ses enfans à la guerre, & il est demeuré pour garder son foyer; cela se dit aussi des faineans ou poltrons qui ne veulent point s'éloigner du coin de leur feu.

Foyer, en termes de Marine se dit des feux allumez au haut d'une Tour éminente pour donner la nuit par leur lumiére l'adresse aux vaisseaux, comme la Tour de Cordoüan sur la riviére de Bourdeaux, les lanternes de la Rochelle, de Boulogne, de l'Ecluse, le Phare d'Alexandrie, &c. On le dit aussi des feux, que ceux qui font le guet sur la côte doivent avoir pour faire des signaux. On appelle aussi foyer dans les vaisseaux l'endroit où on fait le feu.

Foyer en termes de Géometrie se dit des centres des ellipses, des paraboles & des hyperboles où aboutissent les réflexions des rayons qui tombent sur leurs surfaces, & d'où on tire des lignes qui ont de particuliéres proprietez amplement démontrées par Appollonius Pergeus dans ses sections coniques. Les Ellipses ont deux foyers ou centres sur lesquels la figure est décrite, d'où les lignes qui sont tirées à quelque endroit que ce soit de la circonference égalent étant prises ensemble le grand Diametre.

On appelle aussi foyer dans les miroirs ardens, le point brûlant où se rassemblent les rayons soit par la réflexion, soit par réfraction à travers un verre de lunette quand il est taillé en sorte que les rayons soient convergens.

Le foyer solaire est un rond ou cone de brillante clarté & fort vive qui se forme des rayons de lumiére brisez dans un verre sphérique & convergents qui aboutissent à un point brûlant. C'est une erreur de croire que ce foyer soit justement au centre du verre qui a causé la réfraction, il ne va que jusqu'au tiers ou au quart du rayon. Il faut que la retine soit au foyer du cristalin afin que la vision soit parfaite.

En termes de Médecine on appelle foyer le lieu où on croit qu'est le principe & le levain de la fiévre. Les fiévres tierces & quartes viennent de ce que la corruption des humeurs est faite en deux ou trois foyers differents.

Fugue, s. f. Terme de musique, est une suite de consonances qui se chantent à deux parties, dont la premiere s'appelle guide qui précede & montre le chemin à la seconde qu'on appelle consequente ou imitation, replique, redite, écho, c'est à dire, qu'elle montre par quels degrez ou intervalles elle doit aller. La seconde commence à chanter par une notte qui est à la quinte ou à la quarte de la premiere notte. Lorsque la premiere notte de la consequente est à la quarte de la premiere de la guide, on l'appelle fugue en diatessaron, & quand elle est à la quinte fugue en diapente, & ainsi des autres. La fugue grave se jouë dans la grande orgue sur le bourdon, prestant, trompette & clairon.

La contrefugue se fait lors que l'une des parties monte, & que l'autre descend par mêmes intervalles, comme quand la guide fait la, sol, fa, & la consequente fa, sol, la, &c.

 

 

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Date de dernière mise à jour : 05/07/2021