BIBLIOBUS Littérature française

Cloches de Pâques


 

 

- Les cloches sont parties…

Les grosses cloches les premières.

Ou les petites, que sait-on? si diverties,

Si pimpantes de s’en aller toutes légères! –

 

Leur jupe bouffait autour d’elles;

Et le battant ne disait rien,

Comme un oiseau blotti dans une cage.

Elles volaient sans ailes,

Par des chemins à elles, très anciens,

Des chemins bleus au-dessus des nuages.

 

- Les gros bourdons, parfois devant, parfois derrière,

S’essoufflaient à vouloir montrer qu’ils allaient vite.

Et les petites cloches des couvents

Ou des églises de campagne, si petites

Qu’elles semblaient des gobelets d’enfants, si fières

D’aller quand même à Rome – étaient devant,

Derrière, et partout à la fois, toutes légères…

 

- Les enfants regardaient en l’air, criant : Bonjour!

Les gens d’âge levaient aussi la tête,

Mais ne les voyaient plus de leurs yeux clignotants.

 

- Et les enfants attendent leur retour,

Comme une grande fête.

Les gens d’âge attendent aussi, comme on attend

Quand on n’est plus bien sûr de croire aux œufs de Pâques…

 

- Cependant, il faut croire aux miracles, toujours.

Resonnez les Matines, frère Jacques!

Je vois les cloches reparaître, se hâtant…

 

- De leur jupe, sur les jardins, glisse autour d’elles

Tout le printemps de Rome, et chaque battant

S’échappent, aux Alleluias, deux hirondelles.

 

(Sabine Sicaud, Poèmes d’enfant, Poitiers, Cahiers de France, 1926)

 

 

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021