BIBLIOBUS Littérature française

Études littéraires : dix-neuvième siècle (1887) - Émile Faguet (1847 - 1916)

 

 

 

 

A Madame Émile Comte


Son frère affectionné.- E. F.

 


1. Avant-propos
2. Chateaubriand
1. I. Sa vie.
2. II. Son caractère.
3. III. Ses idées générales.
1. 1.
2. 2.
4. IV. Ses idées littéraires.
5. V. Son génie
1. 1.
2. 2.
6. VI. Son style.
7. VII.
3. Lamartine
1. I. Sa vie et son caractère.
2. II. Tournure générale de son esprit.
3. III. Comment il conçoit.
1. 1. — L’Élégiaque.
2. 2. — Poèmes philosophiques. — Poésies oratoires .
4. IV. Sa composition, son style, ses rythmes.
5. V.
4. Alfred de Vigny
1. I. Sa vie et son caractère.
2. II. Ses idées générales.
3. III. L’artiste. — Conception, composition.
4. IV. L’écrivain.
5. V.
5. Victor Hugo
1. I. Sa vie.
2. II. Son caractère.
3. III. Son esprit.
4. IV. Sa sensibilité.
5. V. Ses idées générales.
6. VI. Ses idées littéraires.
7. VII. L’artiste. — Comment il conçoit.
8. VIII. Comment il compose.
9. IX. L’expression dans Hugo.
10. X. Le rythme chez Hugo
11. XI.
6. Alfred de Musset
1. I. Sa vie et son caractère.
2. II. Son tour d’esprit et ses goûts littéraires.
3. III. Son talent.
4. IV. Son génie.
5. V. L’écrivain.
6. VI.
7. Théophile Gautier
1. I. Sa pensée, sa sensibilité, son imagination.
2. II. Ses goûts d’artiste. — Essais et tâtonnements.
3. III. Son domaine propre. — La littérature plastique.
4. IV. Son style. — Ses rythmes.
5. V.
8. Prosper Mérimée
1. I. Son caractère et sa tournure d’esprit.
2. II. Son art.
3. III. L’écrivain.
4. IV.
9. Michelet
1. I. Sa sensibilité.
2. II. Ses goûts d’artiste.
3. III. Ses limites, ses petitesses, esprit de son temps.
4. IV. L’historien. — Qualités, défauts.
5. V. Les œuvres d’imagination
6. VI. L’écrivain.
7. VII.
10. George Sand
1. I. Sa vie.
2. II. Son caractère et son tour d’esprit.
3. III. Son talent. — Première et deuxième manières.
4. IV. Troisième et quatrième manières.
5. V. Composition et style.
6. VI.
11. Balzac
1. I. Caractère et tournure d’esprit.
2. II. Le romancier romanesque.
3. III. Le romancier réaliste.
4. IV. La « Littérature brutale. »
5. V. Les caractères.
6. VI. Composition et style.
7. VII.

 

 

 

Avant-propos


Ceci n’est pas une histoire de la Littérature française au XIXe siècle. Ce ne sont que dix études sur les écrivains de cette période qui ont paru à l’auteur les plus dignes d’un examen attentif. Toutefois les curieux des choses de lettres verront aisément, et les jeunes, gens doivent être avertis, qu’il n’est guère de manifestation considérable du génie littéraire français depuis 1800 qui n’ait trouvé ici sa place, et qui n’y soit représentée par un nom illustre.
De 1800 à 1840 environ, une littérature d’inspiration toute subjective, pour ainsi parler, une littérature d’imagination et de sentiment, et encore mettant au service du sentiment beaucoup d’imagination, a jeté un éclat extraordinaire et laissé dans nos esprits une trace profonde. Cette littérature, dont je me suis plus attaché à montrer le caractère et à étudier l’influence qu’à rechercher les origines, parce que cette recherche, par ma faute sans doute, me semblait ne mener à rien de très solide et assuré, est représentée ici par son incomparable créateur CHATEAUBRIAND ; par LAMARTINE, par DE VIGNY ; par VICTOR HUGO, qui en a comme dépassé les limites chronologiques et prolongé jusqu’à nos jours le retentissement et le crédit ; par MUSSET, enfin, un peu à l’écart, parce qu’à l’inverse des autres, c’est la sensibilité chez lui qui l’emporte sur l’imagination, appartenant bien encore à cette génération, cependant, parce qu’il ne sort guère de lui-même, donne au monde beaucoup plus qu’il n’en reçoit, et, lui aussi, « ne sait que son âme. »
Depuis 1840, le génie français cherche des voies nouvelles et suit des directions qui s’écartent davantage les unes des autres.
C’est d’une part un certain mysticisme politique, issu de la Révolution de 1789, très peu apparent jusqu’en 1840, et qui aboutit à la révolution de 1848. Il a dans l’histoire politique et dans l’histoire littéraire un très grand nombre de représentants, depuis Lamennais jusqu’à Pierre Leroux. Il figure dans ce livre par MICHELET, parce que Michelet avait du génie.
C’est, d’autre part, et tout à l’opposé, un penchant à se détacher de toute philosophie, et môme de toute idée, et presque de tout sentiment, à ne peindre en vers et en prose que des formes tangibles et colorées, à créer une littérature qui soit la rivale des arts plastiques. Cette école, dont nous avons vu dans le cénacle des Parnassiens les derniers héritiers, est représentée dans ce livre par celui qu’elle considérait, ce nous semble, comme son maître, THEOPHILE GAUTIER.
Enfin, né de la littérature d’imagination, marchant longtemps dans le même chemin, s’en détachant peu à peu, pour aboutir à un genre essentiellement différent et presque contraire, nous avons eu en France, très brillant et très considérable, le roman moderne : GEORGE SAND, MERIMEE, BALZAC.
Tous les trois ont un mélange d’art d’imagination et de science du réel. Seulement Mérimée, très avisé et très sage, a su maintenir constamment ces deux parties de son art dans un juste tempérament et un très savant équilibre. — George Sand, trop sensible aux influences d’alentour, ce qui a été son défaut, et d’un génie infiniment souple, ce qui a été une de ses qualités, a commencé par la littérature d’imagination pure et purement romanesque, a touché quelque temps au mysticisme politique et social, et, se modifiant peu à peu, s’est arrêtée à un demi-réalisme, très gracieux, dans une mesure exquise de goût. — Balzac, né réaliste, mais sans goût, a donné, par air et par mode, dans le romanesque le plus faux, ne s’en est jamais détaché complètement, mais, parce qu’il n’était supérieur que dans les parties de son œuvre qui sont réalistes, a vraiment fondé cette école nouvelle, déclinante, à son tour, au moment où j’écris, mais si importante, et comme réaction contre ce qui précède, et en elle-même.
Un cycle considérable de l’histoire de l’art littéraire en France est donc parcouru dans un volume qui commence par Chateaubriand et qui finit par Balzac.
Ce n’est pas à dire qu’il n’y ait point de grandes lacunes dans cet ouvrage. J’y étudie les grands artistes en littérature. Or il se trouve qu’au XIXe siècle les grands artistes ne sont point, pour la plupart, les grands penseurs. Une histoire de l’art littéraire en France depuis 1800 jusqu’à 1860 est à peu près faite dans un livre comme celui-ci. Une histoire des idées en France serait presque mieux faite avec les noms qui ne sont point dans ce volume, avec Benjamin Constant, de Maistre, madame de Staël, Guizot, Tocqueville, Stendhal, Proudhon. Mais ce n’est ni un livre contenant beaucoup de noms, ni un livre sur le mouvement des idées, lequel serait plutôt historique que littéraire, que j’ai voulu écrire.
On remarquera peut-être aussi que je n’ai point parlé du théâtre. A moins d’être bien succinct sur cette affaire, j’aurais, en la traitant, démesurément étendu un livre déjà trop long. Il m’a semblé quo ce sujet du théâtre au XIXe siècle n’a pas encore été assez étudié par d’autres pour pouvoir être exposé brièvement, qu’il serait impossible de ne donner que des résultats, qu’il faudrait entrer dans un assez grand détail, et que ce ne serait pas trop d’un volume sur le théâtre du XVIIIe et du XIXe siècle, par exemple. Je l’écrirai peut-être, car le sujet me tente, si l’indulgence du public continue à m’encourager.
Ai-je besoin d’ajouter, pour les jeunes gens qui me liront, que la lecture de ces études ne peut les dispenser de lire, et de près, les auteurs eux-mêmes, et aussi les trop rares, mais très importants travaux qui ont été faits sur eux ? L’essai qui suit sur Balzac ne peut servir que d’une introduction au beau livre de M. Brunetière sur le Roman naturaliste(1) ; mon étude sur Michelet doit surtout inviter à lire les ouvrages si intéressants de M. Monod et de M. F. Corréard(2) ; mon article sur Musset renvoie aux Morts contemporains de ce critique si ingénieux et de ce moraliste si sagace. M. Montégut(3). Enfin, s’il fallait qu’on choisît, j’aimerais mieux qu’on ne lût point mon travail sur Hugo, et qu’on lût l’étude magistrale de M. Dupuy sur Victor Hugo, l’homme et le poète(4), un des livres de critique et de philosophie les plus profonds qui aient paru depuis bien des années, et qui est déjà classique.
Je souhaite pour le mien que le public y reconnaisse, avec un goût toujours croissant pour notre littérature nationale, une sincérité et une franchise de critique, dont je compte ne jamais me départir.
E. F.
Juillet 1887.

 

 

 

NOTES :
1. Le Roman naturaliste (Calmann-Lévy), 1883. 1vol. in-18 Jésus.^^
2. 1 vol. Sandoz, 1875. — Michelet, par Corréard (Lecène et Oudin). 1 vol. in-8°, 1886.^^
3. Nos Morte contemporains (Hachette), 1883. 1 vol. in-18 Jésus.^^
4. 1 vol. in-18 Jésus, 1887 (Lecène et Oudin).^^

 

 

 

 

Chateaubriand