La malade imaginaire : Pièce comique en trois actes – A. Des Tilleuls ; Illustrations de Levilly
Attention, grands et petits enfants, voilà le spectacle qui
commence. Silence ! Le rideau se lève et vous allez voir ce que
vous allez voir, c'est-à-dire :
La malade imaginaire
PREMIERE ACTE
Voyez la mère Camus couchée dans son lit; elle se croit bien malade parce que le café lui est resté sur l'estomac ; écoulez-la parler à sa servante :
« Ba-ba-Babet, va me chercher l'a-po-po-po.
-Le pot est dans votre table de nuit, répond la servante.
- Bé-Bé-Bête, c'est l'a-po-po-thi-thi-caire que je demande, va le chercher bien vite. »
La malade imaginaire prie Babel, sa servante, d'aller chercher l'apothicaire.
DEUXIÈME ACTE
Voici le célèbre Diafoirus. Personne ne connaît mieux que lui la manière de jouer de la trompette aveugle; il accoste la malade et lui dit : « Eh! bonjour, la mère Camus! vous souffrez dans les replis tortueux qui serpentent dans votre abdomen, autrement dit, et pour employer le langage scientifique, vous avez mal aux boyaux.
-C'est bien ça, mon bon mon-mon-monsieur Dia-foir-foir-Diafoirus, j'ai la co-co, j'ai la colique et j'ai peur de mou-mou, de mourir.
- Allons donc, est-ce qu'on meurt à votre âge? vous avez à peine quatre-vingts ans.
- Oh! là, là, j'ai la colique; gué-guérissez-moi.
-Je vais vous guérir avec ce petit instrument qui connaît l'air du bouillon pointu : tournez votre figure. Voici un petit instrument qui sait jouer Pair du bouillon pointu, dit monsieur Diafoirus.
TROISIEME ACTE
-Chaud! chaud! Il est trop chaud! Ba-ba, Babel au se-secours !
- Me voici, dit Babet; que me voulez-vous?
- Chaud! chaud! il est trop chaud le bou-bouillon.
-Que voulez-vous que j'y fasse? soufflez dessus avant de le boire.
-Tur lu lu tu, madame Camus, le bouillon pointu est au degré voulu, prononça l'apothicaire d'une voix grave et solennelle.
-Tiens, c'est vrai, je suis guérie, s'écria la malade en sautant hors de son lit et dansant la polka.
-Tant mieux, dit la servante en imitant sa maîtresse. »
Monsieur Diafoirus, voyant cela, emboucha sa trompette par le petit bout et joua tous les airs de son répertoire. La pièce est finie. La malade, guérie, dansa la polka, et monsieur Diafoirus joua tous les airs de son répertoire.
(Les marionnettes de Séraphin – 1875)