BIBLIOBUS Littérature française

QUESTION ET RÉPONSES - Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort

HAMID BOUKHEMIS Par Le 02/12/2011

Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort poète, journaliste et moraliste  français  (1741 – 1794) 
                                       

 

 

 

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  • QUESTION
  • Pourquoi ne donnez-vous plus rien au public ?
  • RÉPONSES

 

  • C’est que le public me paraît avoir le comble du mauvais goût et la rage du dénigrement.
  • C’est qu’un homme raisonnable ne peut agir sans motif, et qu’un succès ne me ferait aucun plaisir, tandis qu’une disgrâce me ferait peut-être beaucoup de peine.
  • C’est que je ne dois pas troubler mon repos, parce que la compagnie prétend qu’il faut divertir la compagnie.
  • C’est que je travaille pour les Variétés Amusantes, qui sont le théâtre de la nation, et que je mène de front, avec cela, un ouvrage philosophique, qui doit être imprimé à l’Imprimerie Royale.
  • C’est que le public en use avec les Gens de Lettres comme les racoleurs du Pont Saint-Michel avec ceux qu’ils enrôlent : enivrés le premier jour, dix écus, et des coups de bâton le reste de leur vie.
  • C’est qu’on me presse de travailler, par la même raison que quand on se met à sa fenêtre, on souhaite de voir passer, dans l[a] rue, des singes ou des meneurs d’ours.
  • Exemple de M. Thomas, insulté pendant toute sa vie et loué après sa mort.
  • Gentilshommes de la Chambre, Comédiens, Censeurs, la Police, Beaumarchais.
  • C’est que j’ai peur de mourir sans avoir vécu.
  • C’est que tout ce qu’on me dit pour m’engager à me produire, est bon à dire à Saint-Ange et à Murville.
  • C’est que j’ai à travailler et que les succès perdent du tems.
  • C’est que je ne voudrais pas faire comme les Gens de Lettres, qui ressemblent à des ânes, ruant et se battant devant un râtelier vide.
  • C’est que si j’avais donné à mesure, les bagatelles dont je pouvais disposer, il n’y aurait plus pour moi de repos sur la terre.
  • C’est que j’aime mieux l’estime des honnêtes gens, et mon bonheur particulier que quelques éloges, quelques écus, avec beaucoup d’injures et de calomnies.
  • C’est que s’il y a un homme sur la terre qui ait le droit de vivre pour lui, c’est moi, après les méchancetés qu’on m’a faites à chaque succès que j’ai obtenu.
  • C’est que jamais, comme dit Bacon, on n’a vu marcher ensemble la gloire et le repos.
  • Parce que le public ne s’intéresse qu’aux succès qu’il n’estime pas.
  • Parce que je resterais à moitié chemin de la gloire de Jeannot.
  • Parce que j’en suis à ne plus vouloir plaire qu’à qui me ressemble.
  • C’est que plus mon affiche littéraire s’efface, plus je suis heureux.
  • C’est que j’ai connu presque tous les hommes célèbres de notre temps , et que je les ai vus malheureux par cette belle passion de célébrité, et mourir, après avoir dégradé par elle leur caractère moral.